La percée spectaculaire du high-tech israélien, assimilé à une seconde Silicon Valley, est au cœur du volet économique de la visite de François Hollande en Israël. Témoin de cet intérêt, le président français doit participer demain à une « Journée de l’innovation » organisée à Tel-Aviv. Parmi les participants, figurent les représentants de près de 150 entreprises, dont plus de la moitié de start-up françaises avides de percer le secret des succès israéliens, au moment où l’économie française connaît un sérieux trou d’air.
La haute technologie israélienne aligne effectivement des performances qui ont de quoi faire des envieux. Les investissements dans la recherche et le développement représentent 4,5 % du produit intérieur brut (PIB), soit plus du double qu’en France. Une soixantaine de sociétés d’origine israélienne sont cotées au Nasdaq à New York, le temple du high-tech. Le montant des achats d’entreprises israéliennes par des investisseurs étrangers a atteint 36,2 milliards de dollars entre 2004 et 2013, dont 4 milliards USD depuis le début de l’année. De même, tout le gratin de la haute technologie, Intel, Google, Apple, Microsoft, Facebook, a racheté de petites entreprises israéliennes innovantes et implanté quelque 260 centres de R&D en Israël, pays qualifié il y a quelques années dans un bestseller de « Start-up Nation ». Dans cette liste, les groupes français, dont Alcatel-Lucent et Orange, font plutôt figure d’oiseaux rares.
Pour favoriser l’épanouissement du secteur high-tech, l’État israélien a, dans un premier temps, joué un rôle moteur en créant un premier fond de capital risque il y a une vingtaine d’année. De l’argent public continue à être versé par le chef du bureau de la recherche scientifique sous forme de subventions, voire de prises de participation dans de jeunes pousses jugées prometteuses. « Mais, très vite, le secteur privé a pris le relais », souligne Dan Catarivas, responsable du département international de l’Association des industriels israéliens, la principale organisation patronale. Une myriade de fonds de capital risque israéliens et américains disposent d’un trésor de guerre de 2 milliards de dollars par an (contre 1,5 milliard de USD pour la France) qui permet d’irriguer tout le secteur high-tech.
Autre atout de poids : l’étroite collaboration entre le monde de l’entreprise, les universités ou les instituts technologiques. « La plupart de ces établissements ont créé des fonds chargés de mettre sur le marché les brevets de leurs chercheurs ou de prendre des participation dans les start-up qu’ils ont lancées », témoigne M. Catarivas. « L’idéal pour nos jeunes diplômés, ironise-t-il, ce n’est pas d’intégrer une grande école, comme c’est parfois le cas en France, pour ensuite devenir un haut fonctionnaire jusqu’à la retraite. »
Autre particularité israélienne : de nombreux jeunes patrons de start-up ont fait leurs premières armes pendant leurs trois ans de service militaire dans des unités d’élite, comme la « 8200 », spécialisée dans l’informatique, la cyberdéfense et les communications. Une bonne partie de ces entrepreneurs, dont la réussite suscite de vocations, ont poursuivi ce parcours une fois revenus à la vie civile. Frédéric Szabo, directeur du bureau d’Ubifrance Israël, l’agence française de développement international des entreprises, souligne également l’importance du terreau des petites entreprises. « En Israël, l’innovation est surtout le fait des start-up, alors qu’en France, cette activité a tendance, jusqu’à présent, à être plutôt le fait des grands groupes », relève-t-il.
Mais pour Yossi Vardi, considéré comme le père du high-tech israélien, l’environnement, aussi favorable soit-il, n’explique pas tout. « L’argent, les fonds privés et publics, les études, l’armée : tout cela est très bien, cela crée un climat favorable, mais ce n’est pas l’essentiel. Notre réussite s’explique avant tout par un état d’esprit, une mentalité, une culture et un goût du risque », avance M. Vardi. « Nos jeunes n’ont pas peur d’échouer. S’ils tombent, ils repartent. L’échec n’est pas considéré comme une honte, comme un verdict définitif », estime Yossi Vardi, un des intervenants à la Journée de l’innovation. Il rappelle sans complexe que dans son propre palmarès d’investisseur, il a connu plus d’une vingtaine d’échecs pour autant de réussites.
Source L'Orient le jour