Présenté comme un tournant majeur à la fois pour l’économie d’Israël et pour la société israélienne, le gisement de gaz de Tamar qui doit assurer l’indépendance énergétique d’Israël au moins jusqu’en 2035, a officiellement commencé à être exploité commercialement. Toutefois, il n’est pas sûr du tout, à moyen terme, que les Israéliens bénéficient des avantages économiques et diplomatiques qu’annoncent les autorités israéliennes.
Depuis 2007, la société américaine Noble Energy détient une participation de 36% dans l’exploitation, le reste étant partagé entre trois sociétés israéliennes ; Delek Drilling (31%), Isramco (29%) et Dor Alon (4%), pour un potentiel de 270 milliards de mètres cubes de gaz naturel.
Actuellement, les royalties au bénéfice de l’Etat d’Israël sont limitées à 12,5 %, un taux jugé dérisoire, fixé il y a plusieurs décennies pour attirer des investisseurs. Une augmentation de ce taux à 66% a été envisagée en 2012 par le gouvernement israélien mais pour contrer ce projet, Noble Energy a fait intervenir, selon les médias israéliens, le Département d’État et l’ambassade américaine à Tel-Aviv en vue d’exercer des pressions «au plus haut niveau». Les grands groupes énergétiques israéliens ont aussi lancé une campagne de relations publiques au Parlement et à l’aide d’encarts dans la presse sur le thème : «Si vous changez les règles du jeu en cours de route, plus personne ne voudra investir en Israël ». Depuis, le projet est resté dans les cartons.
Sur le papier, la découverte de très importants champs gaziers en Méditerranée constitue effectivement une bénédiction.
Dans un rapport, la banque suisse UBS estime à environ 14 milliards d’euros la valeur de la future production de deux de principaux gisements surnommés Tamar et Leviathan mais selon un haut responsable israélien du Trésor, dans le meilleur des cas, les royalties ne devraient pas dépasser les 100 millions d’Euros en 2013.
En cause, le coût exorbitant des investissements sur les infrastructures liées à l’exploitation de ces gisements de gaz qui plombe les bénéfices nets. Se pose aujourd’hui également la question du coût des divers projets de pipelines à travers les pays méditerranéens, futurs clients potentiels, qui impacteront les bénéfices à venir, à court, et moyen terme. Des investissements coûteux qui ne seront rentabilisés qu’à l’horizon 2020.
Dans l’immédiat, la pilule passe mal pour les Israéliens. Pour faire face à ces investissements coûteux, les autorités israéliennes ont, le 12 mars dernier, approuvés une hausse de 6,5 % dans les tarifs de l’électricité en 2013. La décision signifie que les tarifs d’électricité pour les ménages avant TVA passeront de 0.5086 NIS par kilowatt / heure à 0.5416 NIS.
C’est le prix le plus élevé pour l’électricité jamais atteint. En 2008, le prix était de 0.5462 NIS par kilowattheure pour une période brève mais la TVA au cours de cette période était seulement de 15,5 % contre 17 % aujourd’hui.
Depuis août 2011, les prix de l’électricité ont explosé de plus de 30%, en partie aussi à cause des attaques terroristes sur les oléoducs égyptiens dans le Sinaï qui ont conduit Israël à se fournir en matière énergétique plus chère.
Le ministre de l’Energie et de l’Eau, Silvan Shalom, a déclaré, samedi : « C’est le jour de l’indépendance d’Israël sur le plan énergétique. C’est vraiment un événement historique. Israël a reçu la liberté énergétique, et le gaz de Tamar va conduire à une diminution drastique des coûts de production d’électricité, donc une réduction future des coûts de l’électricité pour le consommateur israélienne. ». Sauf que les chiffres et prévisions contredisent ces affirmations.
La situation géopolitique de la région n’est pas non plus pour rassurer. Le Liban en trouble a une grande instabilité politique et persiste à contester la frontière maritime établie par Israël incluant les champs gaziers israéliens.
Affirmant avoir appliqué à la lettre les règles de la Convention sur les droits de la mer dont il est signataire, le Liban en a appelé à l’ONU. Mais les mécanismes de résolution de conflit par le Tribunal de la mer et la Cour de justice, ne sont pas applicables entre deux parties qui ne se reconnaissent pas.
Tandis que les diplomates cherchent un moyen de sortir de l’impasse, le langage guerrier prévaut sur le terrain : le Hamas laisse régulièrement planer des menaces d’attaques sur les plateformes maritimes israéliennes tandis qu’Israël augmente considérablement militairement ses capacités de défenses des zones maritimes en question. Des dépenses militaires qui risquent d’être mises à mal par les récentes réductions de budget décidées par le nouveau gouvernement israélien.
Autre risque majeur, les visées belliqueuses turques sur le gaz chypriote intimement lié à celui d’Israël. Ankara conteste depuis 2010 l’accord conclu entre Israël et Chypre délimitant les zones économiques entre les deux pays en Méditerranée pour des gisements de gaz offshore.
Ankara refuse que la République de Chypre -internationalement reconnue- lance des explorations en Méditerranée, arguant que les autorités chypriotes-grecques, qui contrôlent le sud de l’île, ne peuvent exploiter les ressources naturelles de Chypre tant qu’elle n’est pas réunifiée.
Source Lemondejuif.info