L’histoire d’un Juif qui, en 1492, veut devenir pirate. Certains antisémites diront, un sourire en coin, qu’ils le sont tous puisque ce sont des voleurs… Ce n’est pas moi qui le pense, ce sont eux, les ignares qui croient à ce genre de lubies. Sauf que… il y a des Juifs qui ont été de vrais pirates. Donc, le roman Yiddish for Pirates de l’auteur canadien Gary Barwin s’inspire indirectement d’un fait réel, soit la « piratisation » juive post-1492....
L’histoire
Moishe a récemment fêté sa Bar Mitzvah. Malheureusement pour lui, entame sa nouvelle vie d’homme en prenant une grave décision : quitter cette Espagne qui ne veut plus de lui –merci au décret de l’Alhambra- et devenir pirate. Mais avant, il donne à la péninsule ibérique d’autres chances.
Notamment, il s’y cache avec d’autres Juifs qui cherchent tout azimut à préserver de vieux livres désormais interdit ; il tombe amoureux d’une jeune femme et s’engage même dans l’équipage de Christophe Colomb. Rendu dans les Caraïbes, c’est là que notre héros décide de devenir pirate et de se venger du royaume de Ferdinand et d’Isabelle la catholique.
Ce fanatique de cartes et d’aventures se lie aussi d’amitié avec le perroquet Aaron.
L’animal prend une place importante dans le roman. « Retraité » dans une maison de Floride, il nous raconte cette formidable histoire sur fond d’Inquisition, d’intolérance religieuse et de fontaine de jouvence.
Un humour contagieux, teinté de blagues yiddishs, une ironie sans borne, de l’amour, des combats. Bref, une histoire de pirates divertissante et historiquement passionnante.
Des pirates juifs ?
Après le décret de l’Alhambra le 31 mars 1492, l’idée la plus épaisse des rois catholiques de l’Alhambra, on ordonne aux Juifs de quitter la péninsule ibérique. Un gros bravo à Isabelle la catholique et « Saint » Ferdinand II, les artisans de cette christianisation forcée qui élimina un savoir riche et essentiel :
À bord de La Reine Esther ou du Prophète Samuel, plusieurs pirates attaquent les galions espagnols non pas pour l’appât du gain mais pour se venger. Beaucoup de Juifs ont trouvé refuge en Jamaïque et pris la citoyenneté britannique plutôt que de se faire convertir de force au catholicisme.
Parmi ces pirates, notons Sinan Rheis ou Sinan le Juif qui faisait le flibustier pour l’empire Ottoman.
En 1492, ce juif sépharade et sa famille furent expulsés d’Espagne. Établi possiblement à Smyrna, dans l’Empire Ottoman, il devient commandant de la flotte du fameux Barberousse et… l’ennemi juré de Charles Quint !
Fait intéressant, après avoir perdu un œil dans une bagarre, il le couvre avec un bandeau, aujourd’hui un article iconique des pirates.
Soulignons aussi la carrière du pirate-rabbin Samuel Pallache qui a fondé la communauté sépharade d’Amsterdam et fait trembler de peur des capitaines de navires portugais. Parce que eux aussi ont expulsé les Juifs de leur territoire.
The History of Piracy
Mais pour en connaître davantage sur l’histoire de la piraterie, je vous recommande cet essai de Philip Gosse intitulé sobrement The History of Piracy, originalement publié en 1932 aux éditions Longmans, Green and Co.
« Piracy, like murder, is one of the earliest recorded human activities », écrit Gosse dans le premier chapitre de son bouquin. « The references to it coincide with the earliest references to travel and trade ».
Donc, avec les débuts du commerce, on voit poindre les débuts de la piraterie. Les royaumes en quête de richesse auront recours aux flibustiers et aux corsaires pour s’en mettre plein les coffres.
Aussi, de nombreux détails sur la « profession » de pirate, pas de « arrrrr » ni de « mateys », des personnages fous, ambitieux, sans merci et pourtant attachants, une morale discutable, un code d’honneur et des tabous.
BARWIN, Gary : Yiddish for Pirates
Vintage Canada, 340 pages
GOSSE, Philip : The History of Piracy
Dover Publications, 348 pages
Source Prince Arthur Herald
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