mercredi 22 janvier 2014

Bédouins : spoliation ou relocalisation ?


Des violentes émeutes ont éclaté contre la loi Prawer-Begin en novembre dernier. Alors que le ministre de l’Agriculture Yaïr Shamir s’empare à son tour du dossier, le Jerusalem Post expose les deux versants du débat agité sur l’avenir des Bédouins du Néguev...



Un climat tendu. Des jets de pierres ont récemment accueilli les véhicules de diplomates israéliens, en visite dans le désert du Néguev. En cause : la loi Prawer-Begin, enterrée en décembre dernier, puis récemment déterrée par le ministre de l’Agriculture Yaïr Shamir (Israël Beiteinou).
C’est donc lui qui succède à l’ancien ministre Benny Begin (Likoud) pour traiter de cet épineux dossier Bédouins et de leurs revendications foncières. Des amendements au projet de loi Prawer sont à l’ordre du jour. La priorité de Shamir est de gagner la confiance de ces populations afin de pouvoir entamer des négociations dans un climat plus serein. Il confie cependant au Jerusalem Post qu’un accord devra être trouvé à tout prix et que le gouvernement mettra tout en œuvre pour y parvenir. Il faudra légiférer coûte que coûte et faute de consensus, avoir « recourt à la force » s’il le faut pour imposer la loi. Il déplore que les opposants au plan Prawer, de quelque bords qu’ils soient, aient tous perdu de vue l’essentiel, à savoir que ce sont des citoyens israéliens qui « vivent dans la précarité, dans des conditions de pauvreté tiers-mondiste et qu’il faut que cela change ».
A l’occasion d’une tournée dans le Néguev à la mi-janvier, Shamir, a rencontré des Bédouins ainsi que des élus officiels. Son intention est de geler le processus législatif, pour se donner le temps d’étudier ce dossier complexe et d’être à même de proposer des solutions pertinentes. Il a conscience de l’urgence qu’il y a, à booster une initiative de développement économique sur cinq ans qui vise à réglementer la sédentarisation de ces communautés du Néguev. Un compromis doit être trouvé pour satisfaire 63 % des revendications foncières de dizaines de milliers de Bédouins actuellement dispersés dans des villages construits illégalement et légiférer sur leur statut.
Le ministre est pris entre le marteau et l’enclume, avec d’un côté les partisans des Bédouins qui s’opposent à la loi, au motif qu’elle aurait pour conséquence de déposséder jusqu’à 40 000 Bédouins de leurs terres, et de l’autre leurs détracteurs pour qui ce projet de loi est trop en leur faveur. Pour ces derniers, dans la mesure où les Bédouins n’ont pas pu produire de titres de propriété attestant que ces terres leur appartenaient, devant les instances juridiques du pays, l’Etat n’a pas à les leur céder gratuitement à tour de bras. « C’est seulement dans un deuxième temps qu’il faudra en fixer le prix d’un commun accord », dit Shamir.
Interrogé pour savoir si sa version de la loi va prévoir un cadastre qui fournirait une carte détaillée, délimitant le tracé de ces nouvelles propriétés et l’identité de leur propriétaire, ce qui manquait dans le projet de loi initial, il a affirmé qu’il s’y engageait. Les ONG et les députés arabes qui prétendent soutenir les Bédouins, « ne se soucient pas de leur sort et ne visent qu’à servir leur agenda politique personnel », a déclaré Shamir, faisant allusion à une récupération politique par les défenseurs de la cause palestinienne qui auraient agité les drapeaux de l’Autorité palestinienne pendant les manifestations. Il s’agirait bien de récupération, attendu que la communauté bédouine, considérée comme une minorité au sein de la société arabe, n’a jamais été particulièrement bien traitée par les Palestiniens et s’est historiquement plutôt rangée aux côtés de l’Etat hébreu.
Interrogé sur ses éventuels contacts avec les parties qui estiment que le projet de loi initial se montre trop généreux envers les Bédouins, le ministre a répondu avoir pris contact avec Regavim, une ONG qui cherche à garantir une partition responsable des terres nationales dans un cadre juridique. Shamir souhaite avoir une « vue d’ensemble » et garder à l’esprit ce qu’il pourrait en coûter à Israël à l’avenir si cette question n’était pas réglée maintenant. Selon lui, des subventions pourraient encourager de nombreux Bédouins à trouver un compromis avec le gouvernement. « Un grand nombre d’entre eux sont désireux de parvenir à un accord », a-t-il dit. Il a confié que certains Bédouins l’ont contacté après sa nomination, pour lui recommander de ne pas donner de crédit à ceux qui affirment la détermination de leur communauté à rejeter toute proposition.
Ari Briggs, directeur des relations internationales au sein de Regavim, a déclaré au Jerusalem Post : « Regavim est heureux que le gouvernement n’ait pas jeté l’éponge et continue de travailler pour faire en sorte de rétablir le droit dans le Néguev ». 

Source JerusalemPost