Un arbre en Israël pourrait porter le nom d’Albert Göring, frère cadet d’Hermann, l’Abel de la famille Göring. Dans un article du journal italien Fatto Quotidiano du 10 mars 2013, relevé par informazionecorretta.com, Roberta Zunini raconte son histoire.
Interviewée il y a quelques années à propos de la lourde hérédité à laquelle elle était confrontée chaque jour de sa vie, Bettina Göring, petite-nièce du bras droit d’Hitler responsable de la Shoah, a avoué s’être faite stériliser pour éviter le risque de reproduire un autre monstre.
Son frère fit de même.
Ce choix douloureux et définitif n’a pourtant pas apaisé leur douleur.
Elle aura peut-être été atténuée par le livre de l’auteur australien, William Hastings Burke Thirty Four, publié par les éditions Wolfgeist en 2009.
Il y est raconté l’histoire d’Albert, frère cadet d’Hermann Göring, qui sauva des dizaines de juifs de la déportation et de la mort.
Il se mit en danger, en utilisant son nom qui terrorisait les nazis et qui, un temps, ne soupçonnèrent pas son double jeu, pour sauver les juifs avec lesquels il était entré en contact.
Le 9 mai 1945 il se rendit aux américains qui ne crurent pas à sa version des faits jusqu’à ce qu’il établisse la liste des noms des juifs qu’il avait sauvés.
Parmi ceux-là, il y avait la tante de celui qui l’interrogeait, l’épouse juive du célèbre compositeur d’opéra Franz Lehar.
Malgré cela, Albert fut envoyé à Prague et emprisonné au milieu des criminels nazis.
A son procès en 1947, le témoignage des ouvriers de la société Skoda, qu’il avait dirigée en Tchécoslovaquie, le sauva de la mort.
L’intervention d’Hermann Göring lui avait évité plus d’une fois d’être arrêté par la Gestapo qui l’avait à l’œil.
Hermann Goering
Dans une lettre adressée au président de la cour, l’intellectuel et réalisateur Ernst Neubach, écrivit que des centaines d’hommes et de femmes devaient remercier Albert Göring pour les avoir sauvés de la Gestapo et de la déportation.
En 1962, quand Ernst Neubach chercha à faire connaître l’action de son ami Albert Göring aux yeux du monde, les allemands cherchaient plutôt à faire taire le passé.
Personne, pas même les historiens, n’était intéressé par un Göring.
Alors Albert mourut seul, endetté et dans la pauvreté en 1966.
Pour Tony Paterson, dans un article du journal anglais The Independent du 29 avril 2012, le frère d’Hermann Göring est un autre Schindler.
Il raconte qu’à Vienne, Albert Göring s’interposa pour protéger une femme juive au cou de laquelle des nazis avait pendu un écriteau sur lequel était écrit « je suis une truie juive ». Il échangea des coups avec les agresseurs, ce qui lui valut d’être arrêté et vite relâché, une fois son identité connue.
Est-il réellement possible qu’il ait été un résistant au régime nazi, qu’il sauvât la vie à de nombreux juifs et dissidents, aidât les persécutés avec de l’argent et des faux papiers et fît libérer des prisonniers des camps de concentration, s’interroge le journal Der Spiegel.
Probablement, mais ses remarquables exploits demeurèrent inconnus car il refusa qu’ils soient publiés.
Depuis toujours passionné par la cinématographie, il avait de nombreux amis dans ce milieu qui lui demandaient de pouvoir raconter son histoire. Mais il était trop modeste pour accepter.
Albert était l’opposé de son frère aîné à tous points de vue. Grand, mince, raffiné, modeste et détestant la brutalité.
D’où l’hypothèse non avérée qu’Albert ait été le fruit d’une longue relation extra-conjugale de sa mère avec son parrain, le physicien Hermann Von Epenstein, pour moitié juif.
Albert refusa toujours d’adhérer au parti nazi et s’expatria à Vienne, où il prit la nationalité autrichienne.
Après l’annexion de l’Autriche en 1938, Albert fut écœuré par les persécutions dont les juifs étaient victimes. On rapporte qu’il se joignit à un groupe de juifs obligés de récurer le pavé à quatre pattes, ce qui eut pour effet de suspendre l’humiliation.
Liste des "34 noms" de personnes sauvées par Albert Goering
Albert Göring joua également de son influence pour faire libérer son collègue juif, Oskar Pilzer, après son arrestation par les Nazis, et l’aida à fuir l’Allemagne avec sa famille. Il agit de même avec d’autres dissidents.
Nommé directeur des exportations de l’usine Skoda à Brno en Tchécoslovaquie occupée, il extirpa des juifs du camp de Theresienstadt au prétexte d’avoir besoin de main d’œuvre pour son usine, et les libéra aussitôt.
La résistance tchécoslovaque témoigna après-guerre qu’Albert transmit des informations glanées auprès de son frère, en particulier concernant un chantier de construction de U-boat et le plan d’invasion de l’Union Soviétique.
En 1944, la Gestapo qui avait vent des activités d’Albert, lança un mandat contre lui d’arrêt, dont il ne réchappa qu’avec l’ultime intervention de son frère Hermann auprès d’Heinrich Himmler.
Les deux frères se revirent une dernière fois dans un camp américain de prisonniers de guerre en Bavière en mai 1945.
Hermann aurait alors demandé à son frère, dont il savait qu’il serait libéré, de prendre soin de sa famille.
Albert ne fut libéré qu’en 1947, malgré les témoignages des ouvriers de l’usine Skoda.
Bien qu’ingénieur qualifié, son nom de famille dont il s’était tant servi pour aider les persécutés, devint une charge et il dut se contenter d’emplois occasionnels.
Selon László Kovács, son médecin personnel, Albert Göring aurait affirmé : « Je défie Hitler, mon frère, et tous les nationaux socialistes ! »
Sa mémoire pourrait trouver une juste reconnaissance à Yad Vashem si l’Etat d’Israël décidait de planter un arbre à la mémoire de l’Abel de la famille Göring.
Source Tribunejuive.info