lundi 25 février 2019

En Autriche, l’extrême droite tient salon sur l’antisémitisme islamique


Le Kursalon Hübner est l’un des joyaux de l’Autriche impériale, qui raffolait d’historicisme et de la Renaissance italienne. Au XIXe siècle, Johann Strauss y connut ses premiers grands succès. Désormais, le prestigieux bâtiment abrite des événements bien ancrés dans leur temps. Mercredi 13 février, le vice-chancelier, Heinz-Christian Strache, qui est aussi ministre de la fonction publique et des sports, a en effet jeté son dévolu sur cet écrin de prestige pour accueillir la première grande conférence de son nouveau think tank, l'antisémitisme islamique !......Détails........



Proche des néonazis dans sa jeunesse, le vice-chancelier semblait, ce soir-là, savourer le chemin parcouru. 
Il y a un quart de siècle, c’est dans d’obscures zones industrielles de la périphérie de Vienne qu’il développait ses théories d’extrême droite. Presque quinquagénaire, le leader du Parti de la liberté d’Autriche (FPÖ) a maintenant tout loisir de tenir salon sous les dorures des centres de pouvoir. 
D’inviter sept cents personnes – dont les ambassadeurs serbe et bulgare – à une conférence, financée par son ministère, sur un sujet n’ayant rien à voir avec le ski, le foot ni les JO.
Il voulait évoquer l’antisémitisme islamique. Un mélange des genres inédit, une « orbanisation » – c’est-à-dire une captation « à la hongroise » de l’appareil d’Etat à des fins partisanes – critiquée par l’opposition sociale démocrate et écologiste, qui se demande, comme le député Jörg Leichtfried, « sur quelle base légale » on utilise ainsi l’argent public.

Un débat déséquilibré

Rainer Nowak, le rédacteur en chef du prestigieux quotidien conservateur Die Presse, qui avait accepté de diriger les débats, a eu le plus grand mal à instiller un peu d’esprit critique face à des invités ayant fait le déplacement pour dérouler leur thèse. 
Il y avait là le sociologue Michael Ley, auteur d’un livre démontrant l’impossibilité de construire un islam européen et libéral, car « Mein Kampf est un best-seller dans le monde arabe ». 
Laila Mirzo, une Germano-Kurde, arrivée à 11 ans en Allemagne, se définissant elle-même comme une « ancienne antisémite », à cause de la « propagande du régime et des cours de religion » administrés dans son enfance syrienne.
Tous deux ont, par le passé, fait part de leur sympathie pour la mouvance identitaire, selon la presse autrichienne. 
Face à eux, Birol Kilic, le secrétaire d’une association culturelle turque, personnifiait la communauté des musulmans à lui tout seul. 
Il a tenté de persuader l’assistance des intentions pacifistes animant la majorité de ses coreligionnaires. 
Il servait largement de caution, pour une foule venue entendre Henryk M. Broder, un reporter de Die Welt, se définissant comme un « juif allemand sécularisé ». 
Son accolade, fin janvier, avec Alice Weidel, coprésidente du groupe Alternative pour l’Allemagne (AfD, extrême droite) au Bundestag, avait été très bien accueillie par les sites d’information de la droite radicale.
Henryk M. Broder, Laila Mirzo, Michael Ley et Heinz-Christian Strache auront été d’accord sur l’essentiel : si rien n’est fait, le grand remplacement est pour demain.
Et le vice-chancelier d’ajouter : « Je ne veux pas que l’on devienne une minorité dans notre propre patrie. » Il a beaucoup été question d’ailleurs de l’Hexagone lors de cette étonnante soirée. 
Bataclan, Charlie Hebdo : vue de Vienne, la France ressemble à un pays en guerre confessionnelle, avec ses territoires perdus, comme Marseille ou la banlieue de Paris.
On a nettement moins parlé de l’Autriche. Et à aucun moment n’ont été rappelées quelques réalités. 
Les dirigeants de la communauté juive refusent toujours le moindre contact avec le FPÖ, boycotté aussi par Israël. 
Le dernier rapport de l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne (FRA) révèle que 35 % des actes antisémites commis dans le pays alpin en 2017 l’ont été par des musulmans radicaux et 25 % par des militants d’extrême droite. Un chiffre toujours très élevé, donc. 
Début décembre, le quotidien Der Standard a recensé, pour la seule année 2018, 50 prises de parole racistes ou antisémites émanant de la classe politique. Quarante-six d’entre elles avaient été prononcées par des élus ou des cadres du FPÖ. 
Sans doute dans d’obscures zones industrielles. Loin des dorures du beau palais Hübner.

Source Le Monde
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