mardi 24 octobre 2017

Comment l'Unesco peut survivre à un départ des États-Unis et d'Israël

 
Alors qu’Audrey Azoulay vient d’être nommée directrice générale de l’Unesco, le Japonais Koïchiro Matsuura, qui a occupé ce poste de 1999 à 2009, explique le refus du Japon de payer sa contribution. Il décrypte surtout comment il a réussi à faire revenir les Etats-Unis en 2003.....Interview.......



La stratégie pour faire revenir les Etats-Unis à l'Unesco

Le Japonais Koïchiro Matsuura, qui a occupé le poste de directeur général de 1999 à 2009, explique le refus du Japon de payer sa contribution. Il décrypte surtout comment il a réussi à faire revenir les Etats-Unis en 2003.

Vous avez été l'artisan du retour des Etats-Unis à l'Unesco en 2003 sous la présidence de Georges W. Bush. Comment avez-vous fait?

Les Etats-Unis avaient quitté l'Unesco dans les années 1980, à l'époque de Ronald Reagan.
Il a été très difficile de faire revenir les Etats-Unis. J'ai réussi à convaincre le président américain en personne, à l'époque il cherchait des soutiens diplomatiques avant de lancer son offensive en Irak.
J'ai aussi convaincu d'autres personnalités américaines en vue qui m'ont donné leur soutien. Ce fut un processus long et difficile.

Audrey Azoulay, qui vient d'être élue Secrétaire générale, pourra-t-elle faire revenir les Etats-Unis?
Ce sera très difficile. D'abord, il y a un article de loi qui interdit aux Etats-Unis de financer une organisation qui reconnaît la Palestine. Ensuite, alors qu'il était en campagne électorale, Donald Trump n'a pas caché son souhait de quitter l'Unesco.
Tant qu'il sera à la tête de la Maison blanche, il sera quasiment impossible de faire revenir les Etats-Unis. Mais ce n'est pas une raison pour ne rien tenter. C'est un processus de longue haleine qu'il faut commencer dès maintenant. L'Unesco peut essayer de communiquer avec les médias américains dont certains sont très critiques à l'égard de Donald Trump.
Il faudrait également que le Congrès américain vote un amendement qui permette à Washington de financer l'Unesco. Encore une fois ce sera très long et très difficile.

Du fait du retrait des Etats-Unis, l'Unesco est dans une situation financière très difficile. Que faut-il faire en priorité?
Ce n'est pas la première fois que les Etats-Unis cessent de payer. L'Unesco a survécu. Il faudra peut-être faire des coupes dans le budget mais il ne faut pas oublier que des Etats ou des organismes privés peuvent faire des dons à l'Unesco.
Il n'est pas déraisonnable d'imaginer que la France soutienne Audrey Azoulay en faisant une dotation exceptionnelle.
Les entreprises privées américaines peuvent aussi avoir intérêt à contribuer au maintien de la paix et de la sécurité en faisant une dotation à l'Unesco.

Pourquoi le Japon a-t-il cessé de payer sa contribution à l'Unesco?
Le Japon était assez mécontent de la façon dont a été abordée la question du "soi-disant massacre de Nankin".
Les documents qui ont été examinés étaient tous de sources chinoises. On peut se demander si les personnes qui ont rendu leur avis avaient une connaissance suffisante de la langue chinoise pour lire et comprendre les documents.
Huit nouveaux dossiers délicats seront examinés cette semaine par le comité de la mémoire du monde, notamment celui des femmes de confort pendant la Deuxième guerre mondiale.
C'est la Corée qui a demandé l'inscription de ce sujet. Le Japon espère que le comité ne prendra pas de décision. La Chine et le Japon sont plus proches aujourd'hui qu'auparavant notamment à cause des menaces que la Corée du Nord fait peser sur la région.
Ce n'est pas la Chine qui a poussé à ce que la question de Nankin soit examinée par l'Unesco, ce sont plutôt des ONG et d'autres pays. Il est plus important de trouver des raisons de faire la paix que de soulever des polémiques qui peuvent réveiller des sentiments nationalistes.

Le Japon va-t-il quitter l’Unesco comme l’ont fait les Etats-Unis et Israël?
La situation du Japon est très différente. Contrairement aux Etats-Unis, le Japon ne peut pas vraiment se passer d’un siège au sein d’une organisation internationale s’il veut maintenir une présence diplomatique. Je pense que le Japon doit payer la dette qu’il a vis-à-vis de l’Unesco.
Source Challenges
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