Quand le futur de l’Etat juif est en jeu, toutes les autres questions deviennent secondaires.
Manifestation pro-israélienne devant le consulat israélien à New York Photo: Brendan McDermid/Reuters
Le spectre d’un Iran nucléaire se renforce, avec l’annonce de l’installation de 3000 centrifugeuses nouvelle génération, sur son site de Natanz.
Manifestation pro-israélienne devant le consulat israélien à New York Photo: Brendan McDermid/Reuters
Le spectre d’un Iran nucléaire se renforce, avec l’annonce de l’installation de 3000 centrifugeuses nouvelle génération, sur son site de Natanz.
Il devient plus que jamais de l’ordre du possible que l’Etat hébreu se lance dans des opérations militaires en solitaire pour contrer la menace iranienne. Mais l’urgence de la situation n’empêchera pas le président Obama, lors de sa visite à Jérusalem, de tenter de dissuader Israël de s’engager seul dans des frappes ciblées contre les installations nucléaires iraniennes.
On peut se demander, alors, quelle serait la réaction de la communauté juive américaine dans son ensemble. Les tenants et les aboutissants de l’affaire sont particulièrement complexes. Les risques de menaces potentielles qui pèseraient sur Israël, dans ce cas, sont multiples. Nul doute que nous aurions à faire à des tollés de déclarations indignées pour condamner cette intervention de la part des juifs progressistes, qui ont perdu toute confiance dans la ligne dure de la politique de Benjamin Netanyahou.
La dernière menace en date de cette amplitude nous ramène à l’attaque de 1973, lorsque l’Egypte et la Syrie ont conjointement pris les forces israéliennes de court à Yom Kippour. A l’époque, les juifs américains de tous horizons, tant religieux que politiques, avaient réagi d’une seule voix et uni leurs forces pour faire face à l’agression, avec un sens de l’urgence sans précédent, dès lors qu’il s’agissait d’une bataille existentielle et que la survie de l’état juif était en jeu.
Aussitôt, le conflit avait provoqué une déferlante d’empathie pour Israël de la part de toute la communauté juive à l’unisson.
L’agression avait généré un soutien exemplaire et total à l’Etat juif, tant au Congrès que dans l’administration Nixon.
Quatre décennies plus tard, bien que le contexte soit différent, au moment où Israël doit faire face à une menace existentielle, l’attitude de la communauté juive est tout autre.
« On a le temps, aïe, trop tard »
Il y a quarante ans, Israël n’avait pas d’autre choix que la guerre.
En 1973, la menace était palpable, le champ de bataille s’étalait bien visible aux yeux de tous.
Aujourd’hui, la menace iranienne est abstraite, théorique. (Si l’on part du principe que l’Iran n’a pas d’ores et déjà décidé d’utiliser sa bombe nucléaire.) Mais pourquoi l’Etat juif ne bénéficie-t-il pas du même soutien unanime aujourd’hui ? Et pourquoi tant de voix s’élèvent-elles pour réclamer qu’Israël privilégie la voix diplomatique et donne davantage de temps aux sanctions ? Pourquoi en 1973 était-il évident pour tous qu’Israël était en droit de défendre, et pourquoi aujourd’hui, l’Etat ne devrait-il recourir à ce droit qu’en dernier ressort et uniquement à la veille d’une attaque imminente et certaine ? Bien qu’il s’agisse de contextes différents, cela justifie-t-il des points de vue aussi radicalement divergents de la part de la communauté juive américaine ? Personne ne devrait mettre en doute l’ampleur et la réalité de la menace qui pèse sur Israël, alors même que l’Iran clame son intention de rayer le pays de la carte, dès qu’il en aura les moyens.
Les sempiternelles négociations entre les Etats-Unis et le régime des Mollahs n’ont pas fait avancer la situation d’un iota. La politique iranienne est inflexible sur la question du nucléaire. Quant aux sanctions, elles ont mis l’économie du pays en faillite, pays qui, bien qu’exsangue, n’a pas pour autant consenti à ralentir son programme nucléaire.
Le moins que l’on puisse dire, c’est que l’énergie déployée jusqu’ici par l’Amérique pour stopper les ardeurs belliqueuses des états voyous, comme le Pakistan, la Corée du Nord et l’Iran, n’a pas été récompensée. Comme Ariel Levite, ancien député et chef de la commission à l’énergie atomique, l’a exprimé : « L’approche américaine du problème, c’est “on a le temps, on a le temps, aïe, trop tard” ».
Comme en 1973
Il est vrai qu’une frappe israélienne ne ferait que reculer l’échéance d’un Iran nucléaire, alors que mettre le feu aux poudres exposerait Israël aux tirs groupés de l’Iran, de la Syrie, du Hezbollah et du Hamas.
Autre inquiétude pour la communauté juive américaine, une attaque pourrait entraîner les Etats- Unis dans le conflit, provoquant une spirale de violence, avec pour effet une hausse du baril, ce qui serait préjudiciable pour une économie américaine déjà mal en point.
Néanmoins, les juifs américains doivent avoir le courage de faire face au scénario du pire, et se poser les bonnes questions ; voulonsnous soutenir Israël seulement quand cela n’est pas contraire à nos intérêts domestiques ? Voulons-nous subordonner notre soutien à l’état juif aux chances de succès d’une opération militaire Israélienne ? Si Israël, aux heures les plus sombres de son existence, a besoin de l’aide de la communauté juive internationale, ne devrionsnous pas lui accorder notre soutien inconditionnel ? Serait-il bien raisonnable de l’hypothéquer en raison de tout le mal que nous pensons de la politique israélienne dans les territoires disputés ? Il ne fait aucun doute que certains vont interpréter à tort les appels à la solidarité et les prendre pour un soutien aveugle à Israël. Cela équivaudrait, à leurs yeux, à donner carte blanche à l’Etat juif pour se lancer seul dans des opérations militaires contre les installations nucléaires iraniennes.
Mais c’est précisément parce que la situation est en passe de dégénérer, qu’il nous faudrait au plus vite, mettre de côté nos divergences et nos querelles, quant au bienfondé ou non d’une intervention militaire. Mettons tous les voyants au rouge pour lever des fonds supplémentaires et mobiliser tous les lobbies au sein du Congrès et de la Maison Blanche, afin de débloquer une aide militaire supplémentaire, vitale pour Israël à l’heure qu’il est.
Et de même qu’en 1973 nous avions mis en place une stratégie efficace pour lutter contre les sentiments anti-israéliens du monde arabe, qui avaient eu pour conséquence l’embargo sur le pétrole, la communauté juive se doit d’exprimer aujourd’hui son soutien indéfectible à Israël. A nous d’orchestrer une campagne médiatique efficace afin de faire face à un envol des prix du pétrole et à l’engagement des Etats-Unis dans un nouveau conflit.
Certes, nous ne sommes pas en 1973. Néanmoins nous ne devrions pas oublier les leçons du passé ; quand l’existence d’Israël est en jeu, toutes les autres considérations doivent passer au second plan.
Source JersualemPost