« J’ai été choqué par ce qui s’est passé », s’exclame Alexandre Loffet, PS. Arrivé une heure en avance, l’échevin socialiste a assisté « de loin » aux événements. « Ce n’est pas normal.
Les élus doivent pouvoir se prononcer en toute objectivité. Ici, la liberté est mise à mal. Les menaces et les pressions ne peuvent empêcher le bon fonctionnement de la démocratie, sans quoi certains vont se dire qu’il suffit de menacer ses opposants pour faire ce qu’on veut. »
Sur Facebook, il évoque aussi « des élus tellement terrorisés qu’ils n’osent venir au Conseil communal ».
S’il ne le dit pas explicitement, il fait vraisemblablement référence à Saïd Naji : le futur remplaçant d’Hasan Aydin au collège n’était pas présent à la séance du conseil lundi soir et est vu comme « un traître » par de nombreux soutiens d’Aydin.
Freddy Breuwer (MR) a dû, lui, se frayer un chemin à travers la foule, étant même fortement bousculé par le frère d’Hasan Aydin. « Il était en première ligne, on le connaît bien. Ce n’est jamais agréable de vivre un tel accueil », souffle-t-il.
« Les gens ont le droit de manifester, mais il y a des manières de le faire. Personne ne mérite ça. Heureusement que la police était là d’ailleurs. En tout cas, cela reste très instructif et inquiétant sur le genre de personnes à qui on a à faire... »
Même son de cloche chez Jean-François Chefneux. L’échevin Nouveau Verviers dit avoir été choqué. Car sur le parking, Hasan Aydin n’hésitait pas à indiquer aux manifestants qui était qui.
« Je comprends qu’il soit touché. Je comprends même qu’il s’arrête pour une manif qui n’a pas d’autorisation. Mais qu’il incite à huer ses opposants, ce n’est pas correct », commente-t-il. Pour Freddy Breuwer, ce genre d’événement ne peut pas se reproduire. « Il faut espérer que le bon sens et la raison l’emporteront. Il faut oublier et tourner la page. »
Loffet sous protection ?
Du côté de Chefneux et Loffet, on se montre moins lisse. « Si c’est ça la politique verviétoise, je ne veux plus en faire », assène l’échevin socialiste. « On parle quand même d’intimidation et d’antisémitisme, ce qui est un délit ! La politique verviétoise ne peut pas être celle-là. » « On ne doit certainement pas céder à ces pressions.
Le politique ne peut pas se laisser intimider par ces pratiques », appuie Jean-François Chefneux, qui ajoute : « Il y a eu des menaces et il y aurait légalement des possibilités de porter plainte. »
Une plainte, Freddy Breuwer ne pense qu’il en déposera une. « Je me réserve le droit de le faire, mais je pense que les choses doivent se calmer. »
L’insécurité semble bien présente au sein de la majorité. « Je suis en discussion avec la police pour avoir droit à une protection.
Des personnes ont demandé mon adresse », dévoile Alexandre Loffet, qui juge la manifestation de ce lundi comme étant un avertissement en vue du prochain conseil communal.
« Ils veulent faire en sorte que certains renoncent à leurs prérogatives démocratiques. »
Une plainte de la Ligue contre l’antisémitisme
Notre vidéo de la manifestation dans laquelle on entend clairement des personnes traiter Freddy Breuwer de « sale juif » est remontée jusqu’à Bruxelles.
Trois signalements ont été faits à la Ligue belge contre l’antisémitisme, nous dit son président, Joël Rubinfeld. Son organisation va porter plainte. « Parce que ça suffit. Le problème, c’est vraiment cette libération de la parole sur la place publique. Dire ça en toute impunité n’est pas acceptable. »
Ses électeurs se sentent floués
Lors de la manifestation de soutien à Hasan Aydin, il y avait des hurluberlus à deux doigts d’agresser les échevins, dont certains très proches d’Hasan Aydin lui-même. Mais ils ne constituaient pas la majorité des militants.
Le moins que l’on puisse dire, c’est que ces personnes n’ont pas la même lecture de la situation que les élus. Pour eux, Hasan Aydin s’est fait mettre de côté car il dérangeait.
Notamment en vue des élections de 2024. « Quand Muriel Targnion est devenue bourgmestre, ça aurait dû être Hasan. Mais on n’en a pas voulu parce qu’il est musulman », se souvient Khadija. « Ici, de nouveau, on veut le mettre de côté parce qu’il pourrait prendre la place de Targnion. Alors nous, on en a marre. On a vraiment l’impression qu’on ne respecte pas les électeurs d’Hasan. Il est mis de côté. Tout ça parce qu’il est d’origine étrangère. »
Pour les nombreuses personnes à qui nous avons parlé sur place, les accusations de Muriel Targnion et de ses échevins ne tiennent pas. « Il se serait disputé avec eux et il n’aurait pas été poli.
C’est normal que lorsqu’on est passionné par quelque chose, on s’emporte et les mots dépassent parfois la pensée. Ce n’est pas une raison pour faire une croix sur les 2.388 électeurs. »
« Un vrai socialiste »
En ce qui concerne les problèmes de salle d’étude du CPAS qui serait concurrente de celle de la ville, là non plus, l’argument ne fait pas mouche. « Donc, en fait, on a quelqu’un qui fait de son mieux pour aider les gens et on va le lui reprocher ? C’est n’importe quoi », s’énerve un de ses soutiens. Hasan Aydin est en effet connu par ses supporters pour sa fibre sociale. « Un monsieur proche de nous, qui se bat pour nous aider. C’est un vrai socialiste qui écoute les problèmes des gens.
Le dernier truc qu’on lui reproche, c’est de tenir des permanences ? Donc on ne peut plus aider ceux qui ont besoin d’un coup de main ? »
La montée de Saïd Naji au sein du collège aurait pu apaiser les demandes de ces personnes qui estiment pour beaucoup que l’éviction d’Aydin est une nouvelle stigmatisation des musulmans. Il n’en est rien. Beaucoup parlent de lui comme étant un traître.
« Hasan a beaucoup aidé Saïd. Il l’a pris sous son aile, il a fait campagne pour lui. En retour, quand Saïd a pu prendre sa place, il n’a pas hésité. Je suis très déçu de cette attitude », nous indique un homme qui aurait bien aimé lui expliquer en face sa façon de penser. Or, Saïd Naji n’est pas venu au conseil communal.
Source La Province
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