mardi 2 juillet 2019

Le pétrole de schiste, l'arme secrète des Etats-Unis contre l'Iran


Depuis son retrait de l’accord nucléaire iranien du 14 juillet 2015, le président américain Donald Trump exerce « une pression maximale » sur l’Iran, c'est-à-dire une tentative de suffocation économique du régime de la république islamique.......Décryptage.........



L’enrichissement de l’uranium est un prétexte puisque Trump ne cache pas qu’il veut punir l’Iran, coupable de soutenir au moins trois organisations anti-israéliennes. 
Téhéran a réagit en annonçant ce 8 mai 2019 qu’il ne mettra plus en œuvre certaines dispositions de cet accord, et qu’il donnait un délai de 60 jours aux autres signataires de l’accord pour maintenir leurs engagements, principalement de pouvoir permettre à l’Iran de vendre son pétrole dans le monde. 
A défaut, la République islamique menace de reprendre son enrichissement de l’uranium et la construction d’un réacteur à eau-lourde menant, à terme, à la possession de la Bombe Atomique. 
50 jours sont passés et Téhéran blâme le reste de la communauté internationale, en particulier l’UE pour inaction face à la détermination de Washington (la mise en œuvre de Instex, la chambre de compensation euro- rial iranien, tarde). 
L’Iran réplique  que l’Arabie saoudite soutien le terrorisme islamiques. Il refuse les bons offices de Shinzo Abe qui était porteur d’une lettre personne de Trump. L’escalade n’est pas loin.
Les escarmouches de ce dernières semaines dans le Golfe Persique –  que les saoudiens veulent appeler Golfe Arabique, -  vont-elles dégénérer du fait du refus de Téhéran de négocier tant qu’il y a des sanctions ? Espérons que non car les conséquences pourraient être dramatiques. L’avenir nous le dira.

Le nouveau paradigme énergétique

Mais pourquoi le président Trump se montre-t-il aussi déterminé ? Qu’est-ce qui lui permet de faire preuve d’une telle assurance et opiniâtreté ? C’est parce que nous avons changé de paradigme énergétique. 
Cette nouvelle situation énergétique mondiale n’est, ni de près ni de loin, liée à la décarbonisation annoncée pour dans quelques décennies. 
La géopolitique ne s’embarrasse pas  d’objectifs politiquement corrects, qui au demeurant n’intéressent que les dirigeants européens et les activistes écologiques ? 
Les énergies fossiles représentent en 2018 86% de la demande d’énergie primaire mondiale et on voit mal comment on pourra arriver à une décarbonisation comme l’illustre le graphique suivant, en plus en abandonnant le nucléaire.

Non, la nouvelle situation énergétique mondiale n’est pas la décarbonisation, qui n’existe d’ailleurs pas puisque les émissions mondiales de CO₂ ont augmenté de 1 % par an entre 2007 et 2017 et de 2% entre 2017 et 2018

La nouvelle situation mondiale est celle de l’abondance des énergies fossiles et de leur meilleure répartition que dans le passé.

La nouvelle abondance

Après la crise pétrolière de 1973 instiguée par le Colonel libyen Mouammar Kadhafi  , la jeune république islamique d’Iran, dont on vient de « célébrer » les 40 ans en février dernier, jette l’Occident dans un marasme total avec l’aide d’autres producteurs de la région, coupable aux yeux des producteurs arabo-musulmans de ne pas abandonner leur soutien à Israël en échange de la paix pétrolière. 
Il faut donc vite trouver du pétrole, si indispensable à nos économies qui ne peuvent vivre sans transport. 
Aux USA, le Président Jimmy Carter lance un plan d’énergies renouvelables avec pour objectif (très) ambitieux que l’ensemble de l’énergie aux USA – et non pas seulement l’électricité – soit à 20% d’origine solaire. 
Observons que le solaire n’y représente aujourd’hui que 0,8 % du total de cette consommation, ce qui démontre que les annonces dans le domaine de l’énergie ne sont pas nécessairement suivies de faits...
Mais le président Carter lance aussi des projets pour exploiter d’étranges gisements nationaux de pétroles que les géologues lui ont signalés. Il s’agit de ce qu’on appelle, en géologie, de la « roche-mère » et que l’on a appelé erronément schiste. 
Il s’agit de pétrole et du gaz localisés à l’endroit même où la nature les a fabriqués, à quelques 3 km de profondeur et où les conditions géologiques les ont laissés en place plutôt que de migrer vers des réservoirs que l’on appelle « conventionnels ». 
Mais voilà, exploiter ce pétrole « non-conventionnel » n’était pas possible avec les technologies de l’époque. Afin de forcer ce développement, Carter décide d’offrir des conditions exceptionnelles : pour compenser les risques de mise au point de cette nouvelle technologie d’exploitation, les coûts élevés de cette hypothétique production- si jamais ce pétrole pouvait être produit -  il s’engage à ce que ce dernier bénéficie du prix mondial et non pas du prix du marché américain. 
Le numéro de février 1981 de la revue National Geographic est consacré aux multiples solutions qui devaient permettre à l’Occident de résister à la pénurie de pétrole, solutions qu’on nous décrit aujourd’hui comme des innovations de notre temps. 
Il présente ainsi sur une double page une coupe géologique , avec des puits et des galeries, comme dans une mine de charbon, pour aller retirer de cette roche-mère le précieux pétrole. 
Le titre de cette double page illustre parfaitement le défi de l’époque : « arracher le pétrole de la roche récalcitrante ». Car cette roche, en effet, contrairement à celle des gisements conventionnels, possède une très faible perméabilité, de sorte qu’elle est extrêmement difficile à exploiter. 
Le contre-choc pétrolier de la première moitié des années 1980 vient mettre fin à toutes ces recherches et tout le monde abandonne le rêve d’exploiter ces roches-mères.


Comme dans la fable du laboureur et de ses enfants

Tout le monde ? Pas Georges Mitchell, le fils d’un cordonnier grec immigré aux USA. Chose qui n’est pas rare au Texas, il est propriétaire d’ une entreprise de services pétroliers, « Mitchell Energy’s ». Déterminé, il se met en tête de vouloir vaincre cette roche récalcitrante. 
Entre les années 1980 et 1990, sur le site de Barnett, près de Fort Worth, au centre-nord du Texas, il va s'entêter, contre le conseil de ses amis pétroliers, qui finissent par se moquer de lui. Après de nombreuses difficultés et six millions de dollars investis en recherche, et au terme de 18 années d'effort, le succès est enfin au rendez-vous. 
Mitchell démontra que les énormes gisements de gaz de roche-mère des États-Unis pouvaient être exploités techniquement et économiquement. Il ne pensait certainement pas à l’époque que sa maîtrise technologique allait ouvrir une nouvelle ère dans la politique énergétique mondiale, et allait avoir des répercussion jusqu’en Iran. 
Le fils du cordonnier avait donc inventé le moyen de produire du pétrole et du gaz dit erronément « de schiste ».
Comme dans la Fable de La Fontaine ,« Le laboureur et ses enfants », Mitchell a pris de la peine, « Creusant, fouillant, bêchant, ne laissant nulle place où la main ne passe et repasse », mille fois il a retourné le champs pour trouver le trésor qui y était caché. 
La morale de l’histoire, c’est que le travail est un trésor. De même, aujourd’hui, le monde avance à force d’efforts, de courage, de recherche et développement. Sans innovation, le monde stagne. La richesse, la prospérité, la santé ne proviennent pas de la nature (c’est bien pourquoi les êtres humains sont passés de chasseurs cueilleurs à agriculteurs), mais du génie humain qui la travaille et la transforme. 
Il en est de même pour la géopolitique de l’énergie, c’est l’innovation technologique des ingénieurs et des industriels qui la façonne.

Force des USA et faiblesse de l’Iran

Présenté comme une bulle sans avenir, cette exploitation - qui, contrairement à ce que d’aucuns affirment, n’a pas plus d’impact sur l’environnement que toute autre exploitation d’hydrocarbures, voire même que la géothermie – a permis aux USA de devenir le premier producteur de pétrole dans le monde. 
Avec une augmentation de leur production de 16,6% entre 2017 et 2018, et de 6,7% par an en moyenne sur les dix dernières années, les États-Unis ont produit près de 15,3 millions de barils par jour (Mb/j) d'hydrocarbures liquides en 2018, dépassant de plus de 3 Mb/j le géant historique, l’Arabie saoudite (12,3 Mb/j en 2018). 
Les États-Unis sont aussi devenus un exportateur majeur de gaz naturel. Depuis le début de 2019, 35% du gaz de schiste américain - présenté par les écologistes comme une abomination environnementale - est livré dans l’UE, où il représente 13% des importations européennes de gaz. La Commission européenne salue d'ailleurs sur son site la croissance de ces importations présentées comme le fruit de la visite de son président Jean-Claude Junker faite à Donald Trump en juillet 2018.
Le pétrole et le gaz de schiste américain ont bouleversé la donne géopolitique mondiale. 
Ils permettent aux USA d’imposer des sanctions de plus en plus sévères à l’Iran, car le monde peut désormais se passer des réserves de pétrole et de gaz de ce pays (10% et 15% respectivement des réserves mondiales). Inversement, l’Iran ne peut pas se permettre de ne pas vendre son pétrole.
‘L’accord nucléaire’ du 14 juillet 2015 porte ce nom car l’objectif de Barack Obama était d’empêcher que l’Iran puisse arriver au seuil de la production d’une bombe atomique. 
Mais, étrangement malgré son titre, il contient 65 fois le mot « pétrole » : en fait le régime iranien voulait, en échange du ralentissement de son programme nucléaire, revenir en force sur le marché pétrolier mondial et ainsi contrarier dans le même temps l’Arabie saoudite, son adversaire régional et religieux. Sans les revenus du pétrole, (ne parlons pas du gaz, car, malgré leur énorme gisement de South Pars, les Iraniens ne possèdent pas la technologie pour le produire), le pays est menacé d’asphyxie. Il y a longtemps que ceux qu’on appelle les « faucons » le disent à Washington.
La ténacité de Mitchell a ainsi donné aux États-Unis un avantage extraordinaire sur le reste du monde. 
De plus, le gaz naturel  étant si bon marché cella donne des ailes à l’industrie américaine chimique et la production d’électricité devenant moins chère  qu’à partir du charbon les émissions de CO₂ diminuent.
Avant la Révolution islamique de 1979, l’Iran produisait 8,3% du pétrole mondial ; en 2018 cette part est tombée à 5%. Alors que l’Iran du Shah vendait 5,6 Mb/j de pétrole, l’Iran de la République islamique a dû se contenter l’an dernier d’une exportation de 2,8 Mb/j – la moitié ! 
En mai 2018, la « pression maximale » exercée par Donald Trump, est telle que le régime islamique a exporté 400 000 b/J. Il ne pourra pas accepter encore longtemps cette asphyxie. 
Si aujourd’hui, le monde peut très bien se passer du pétrole iranien, le régime iranien, lui, aura beaucoup de mal à se maintenir. Les mollahs le savent : ils vont devoir apporter une réponse appropriée. Le pétrole de schiste embête énormément les chefs chiites.

Source Atlantico
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