mardi 23 juillet 2019

Ernest Lothar, l’écrivain viennois qui avait fui les nazis et su décrire l’Europe en ruines


A New York, Felix von Geldern a fini par goûter aux plaisirs de la vie en Amérique. C’est la guerre et, tandis que les nazis occupent l’Autriche, ce juriste discret, moins flamboyant que les autres von Geldern, émigrés comme lui, jure ses grands dieux à l’officier d’immigration qu’il sera désormais un fier Américain, et qu’il servira toujours les intérêts des Etats-Unis.......Détails.........



Mais quand Vienne sera libérée, Felix ne sera pas long à monter à bord du paquebot « Brésil », et à mettre le cap sur son pays natal. 
Sa mère, qui a perdu la vue à force de privations (elle est restée à Vienne pendant toute la guerre), l’a supplié de rentrer. A son arrivée, il pleut sur une ville qui n’est plus qu’un atroce champ de ruines.
Quel flair a eu Liana Levi de redécouvrir, il y a trois ans, l’écrivain juif autrichien Ernest Lothar, auquel Arthur Schnitzler a fait trop d’ombre pour qu’il échappât, dans les dictionnaires, au traitement qu’on réserve aux petits-maîtres ! 
Né en 1890 dans l’actuelle Brno, en République tchèque, émigré à New York pendant la guerre (il y fonde l’Austrian Theater), Lothar était, comme son héros Felix, docteur en droit. 
De retour à Vienne, il intègre les équipes de dénazification alliées, participe notamment à l’étude du cas Herbert von Karajan, écrit plusieurs romans dont « Mélodie de Vienne » en 1944, puis « Revenir à Vienne » cinq ans après.
Dans ce roman inspiré de ses propres souvenirs, Lothar raconte la descente aux enfers de Felix, forcé de constater que sa mère, qui ne s’est jamais opposée aux nazis, continue d’aimer un vieux sympathisant de Hitler.
Quant au héros, il épouse une chanteuse qui fut l’ancienne maîtresse de Goebbels. Observateur lucide, Lothar ne se départit cependant jamais de son incroyable élégance. 
Comme si, à chaque instant, Audrey Hepburn allait apparaître et entraîner Felix dans une valse endiablée.
Mais ce roman ne serait aussi précieux si, avec une grande intelligence, Lothar n’y décrivait l’Europe à la manière de ces fictions documentaires que Rossellini tourna en Allemagne ou en Italie juste après la guerre : il y a les rues en ruines, bien sûr, mais c’est sur les visages que l’Europe paraît la plus meurtrie. 
Paris n’échappe pas à la règle : les Champs-Elysées, raconte Lothar, « ne sont plus l’avenue fabuleuse que Felix gardait en mémoire. 
Ils sont gris à présent et un peu miteux, comme ce monsieur là-bas aux guêtres blanches sous des pantalons élimés ».

Revenir à Vienne, par Ernst Lothar traduit de l’allemand par Elisabeth Landes, Liana Levi, 520 p., 23 euros.

Didier Jacob

Source Koide9enisrael
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