« Pourquoi voter pour un autre que Netanyahu, confie Shlomo, chauffeur à Tel Aviv. Il a fait de bonnes choses dans les domaines de l’économie et de la diplomatie. Avec lui, on sait où on va ».
A un peu plus de deux mois d’un nouveau scrutin législatif déterminant pour l’avenir du pays, le Premier ministre conserve une base partisane. Bien qu’en baisse dans les derniers sondages, « Bibi » a encore la capacité de rebondir. « Je suis incapable de vous dire qui va l’emporter, confie Rina Matzliach, journaliste politique. C’est très compliqué alors que le paysage est en pleine recomposition ».
Comme à chaque scrutin, l’électorat devrait être très divisé. Les partis cherchent les voix comme ils vont au supermarché. Les alliances, à droite, au centre comme à gauche, sont tissées au gré des intérêts.
L’ancien Premier ministre Ehud Barak a récemment annoncé son retour en politique à la tête d’« Israël démocratique ».
Il déploie l’énergie d’un adolescent et s’en prend à Netanyahu qu’il appelle à quitter la scène. Il tentera d’unir une gauche qui ne pèse plus grand-chose sur l’échiquier politique et a gâché son rôle historique de rapprocher juifs et arabes israéliens. Il pourrait rogner des voix dans l’électorat centriste.
De son côté, Benjamin Netanyahu a vu Moshe Kahlon, le chef du parti centriste Kulanu, le rejoindre.
Naftali Bennett, patron de la Nouvelle droite, pourrait aussi s’associer au Likoud. Mais le Premier ministre décontenance ses électeurs.
Les médias ont révélé qu’il avait dragué un parti arabe islamiste – après l’avoir vivement critiqué – pour monter sa coalition. Il a aussi assuré qu’il ne procédera pas à une nouvelle dissolution de la Knesset.
Ce qui donne du grain à moudre de ses détracteurs, l’accusant d’avoir dissous pour sa survie politique.
Les quatre partis arabes devraient, quant à eux, former une liste commune. « Le vote des Arabes israéliens a tendance à s’éroder en raison de la loi Etat-nation du peuple juif, indique Khaled Abu Taomeh, journaliste au Jerusalem Post.
Ils se sentent moins concernés par la politique et veulent surtout plus de démocratisation, une meilleure éducation, des emplois et ne plus être considérés comme des citoyens de seconde classe. »
D’autres inconnues n’ont pas été levées. L’ancienne ministre de la Justice, Ayelet Shaked, et Moshe Feiglin, un ancien membre du Likoud, n’ont pas encore fait part de leurs intentions.
Au Centre droit, Benny Gantz, devrait poursuivre son alliance avec Yair Lapid dans Blue and White. Les deux hommes ont obtenu 35 sièges comme le Likoud lors du dernier scrutin.
« Nous espérons arriver en tête et promouvoir une plateforme plus libérale », explique Yorai Lahav Hertzanu, député de Blue and White. La formation souhaite créer un gouvernement d’union avec le Likoud mais sans « Bibi ».
Tutelle.
Pour Benjamin Netanyahu, l’équation est simple. Il doit être en mesure d’avoir une coalition de 61 députés, soit la majorité à la Knesset. S’il ne l’obtient pas, les caciques du Likoud comme Gideon Sa’ar, Yuli‑Yoel Edelstein, Guilad Erdan pourraient s’émanciper de sa tutelle. Pour l’instant, personne n’ose franchir le Rubicon.
Et les alliés du Likoud continuent de défendre le Premier ministre. « Tant qu’il n’est pas condamné par la justice, il a le droit de se présenter et de gouverner», indique Moti Yogev, membre de la Knesset pour le Foyer juif.
Même son de cloche au sein d’Israël Beytenu, le parti d’Avigdor Liberman qui a refusé d’intégrer la dernière coalition proposée par Benjamin Netanyahu. « Nous n’avons pas de problème personnel avec Netanyahu, il peut être le prochain Premier ministre, confie l’un de ses cadres.
Mais nous sommes contre les exemptions de service militaire accordées aux partis religieux et avons besoin d’un gouvernement stable. »
La campagne devrait être courte et s’orienter vers un référendum pour ou contre « Bibi ».
Elle sera focalisée sur la sécurité, la relation entre l’Etat et la religion, les disparités sociales.
Le plan de paix et les implantations ne passionnent plus. L’ombre des affaires devrait aussi planer, Benjamin Netanyahu étant convoqué par la justice le 2 octobre prochain.
« Ça sent quand même la fin de règne pour Bibi, explique Emmanuel Navon, professeur en relations internationales à l’Université de Tel-Aviv. Il aura du mal à rassembler une majorité ».
Dans la ville de Sderot, à la frontière de la bande de Gaza, la population se plaint de ne pas être suffisamment protégée après les dernières salves de roquettes, en juin. « Nous allons voter au centre, confie Susan, une habitante de la ville. C’est le moment de vivre en paix. »
Les Israéliens sont en vacances et peu intéressés par les débats. Tout se jouera en fin de campagne.
« Il devrait y avoir une abstention plus importante, conclut Denis Charbit, professeur de sciences politiques de l’Université ouverte d’Israël. Cela devrait favoriser les formations religieuses comme les ultraorthodoxes qui resteront mobilisées au détriment des partis traditionnels ».
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