dimanche 18 décembre 2016

Monique Piffaut, charcutière juive et très secrète patronne lègue sa fortune à l’enfance


 
C’est le personnage le plus secret et le plus original du patronat français qui est disparu la semaine dernière à l’âge de 78 ans. En moins de trente ans, Monique Piffaut avait fédéré quelques unes des plus belles marques de l’agroalimentaire (William Saurin, Paul Prédault, Madrange, Garbit, Panzani, Petitjean…), souvent en difficulté, pour en faire un groupe industriel, spécialiste de la conserve et de la charcuterie, important fournisseur de la grande distribution pour ses marques propres et atteignant 1 milliard d’euros de chiffre d’affaires, employant près de 3.500 salariés sur 21 sites industriels.....



Conformément à ce qu’elle avait annoncé à ses collaborateurs depuis plusieurs années déjà, en l’absence d’héritiers directs, et soucieuse de préserver l’intégrité de son groupe, elle avait décidé de léguer son patrimoine à une fondation de protection de l’enfance, qui est en cours de création .
Même si Monique Piffaut dirigeait elle-même d’une poigne vigoureuse l’ensemble de ses usines et établissements, elle avait nommé un directeur général Denis Michault qui reste seul aux commandes aujourd’hui.
Le notaire de Monique Piffaut va aussi avoir la mission de remettre aux héritiers les clés des très nombreux immeubles qu’elle possédait à Paris et qui lui rapportaient des revenus supérieurs à ceux de ses usines.

Une boule de cristal avant de recruiter

« Prendre ma retraite? Jamais de la vie, vous me voyez passer mes après-midis avec mes copines à prendre le thé chez Angelina au son du grincement des dentiers? » répondait cette femme étonnante, toquée de voyance, qui changeait très souvent de collaborateurs, d’avocats et de prestataires sur un coup de sang, mais n’engageait jamais leurs remplaçants sans avoir consulté la boule de cristal installée dans son bureau de la rue Lafayette à Paris.
Elle convoquait ses interlocuteurs chez Drouant à l’heure du déjeuner, où elle accompagnait toujours son repas d’une bonne bouteille de Pessac-Léognan (Bordeaux) et où les autres clients du restaurant n’imaginaient pas en la côtoyant, toujours habillée d’un tailleur Chanel, qu’elle était une femme d’affaires exceptionnelle et une patronne proche de ses troupes mais intransigeante.
« Vous allez vous mettre au travail de suite, sinon je ferme! » avait-elle lancé, seule face aux 200 salariés en grève de Madrange, lors de la reprise du spécialiste du jambon en 2011.
Cette ancienne banquière passée par la grande distribution, avait bénéficié de l’appui de la Caisse des dépôts pour ses premières acquisitions. Elle présidait elle-même chaque comité d’entreprise de ses établissements, signait tous les courriers, lettres d’embauche et contrats à l’encre violette pour être sûre qu’on distingue bien son visa, et recevait dans son bureau les agences de publicité, chargée de promouvoir ses marques.
A l’ancienne mais au pas de charge. Soucieuse de rajeunir ces icônes de la société de consommation, elle avait accepté que William Saurin parraine le concours d’aventuriers télévisé Koh-Lanta sur TF1.
Symbole de sa stratégie d’acquisition d’une taille critique pour répondre aux besoins de la grande distribution, en 2010, elle avait injecté plus de 20 millions d’euros dans une usine de fabrication de jambons de 20.000 mètres carrés à Goussainville (Val-d’Oise).
La plus grande d’Europe! Une fabrique dernier cri permettant de « sortir » des millions de tranches de jambons sous blister à la chaîne, s’apparentant plus à l’usine de Tricatel dans l’Aile ou la Cuisse, qu’à un haut lieu de la charcuterie traditionnelle.

Une « israélite » qui produisait du jambon pour toute la France

Cette femme secrète qui refusait d’être prise en photo, était fière de son action pour l’emploi même si elle a parfois dû fermer des établissements dont la rénovation aurait été trop coûteuse.
Elle était certaine que sa vision et son activisme offraient la meilleure opportunité, à terme, de sauvegarder un outil industriel malmené par la course aux prix bas dans les hypermarchés.
Descendante d’une famille juive originaire d’Autriche, elle s’amusait elle-même qu’une « israélite » comme elle se qualifiait, produisît du jambon pour toute la France.
Elle avait tardivement renoué avec la foi de ses parents guidée par l’une de ses collaboratrices. Farouchement indépendante, féministe de caractère, elle s’inventait parfois des aventures rocambolesques d’ancienne espionne pour le Mossad.
Source Tribune Juive
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