Ce minibus Mercedes numéroté qui zigzague durant le sacro-saint shabbat, c’est à la fois pas grand-chose et une immense transgression.
Une sorte de «terre promise» des juifs laïcs.
Depuis un mois, la municipalité de Tel-Aviv et une poignée de communes limitrophes ont mis en place un service de transports en week-end, prenant soin d’éviter les enclaves religieuses.
Succès immédiat. Environ 10 000 personnes ont saturé le service, gratuit qui plus est. La mairie a promis des bus à taille normale à l’avenir.
Ces six lignes de bus fendillent ce qu’on appelle ici le «statu quo» religieux.
En 1948, David Ben Gourion, le peu pratiquant mais très pragmatique fondateur d’Israël, avait négocié l’assentiment des ultraorthodoxes à son grand projet étatique.
Parmi ses concessions : pas de service militaire pour les religieux, pas de mariage civil et pas de transports durant le jour juif du repos.
Ces dix dernières années, les transports publics durant le week-end - comme la conscription des hommes à papillotes dans l’armée - sont devenus l’une des principales doléances du camp laïc en Israël.
Autant un besoin qu’une réplique à l’influence des «craignant-Dieu», perçue comme envahissante au fil des années Nétanyahou.
Aujourd’hui, les «bus du shabbat» ne sont plus un caprice de blasphémateurs urbains, mais une idée figurant au programme de Bleu-Blanc, la formation «tout sauf Nétanyahou» arrivée en tête aux dernières élections.
Le maire de Tel-Aviv, Ron Huldai, a profité de la paralysie gouvernementale en exploitant une faille dans la législation : la gratuité.
La mise en place d’une grille tarifaire aurait dû obtenir l’aval du ministre de l’Intérieur, l’ultraorthodoxe Arié Dery.
Samedi, 500 religieux ont manifesté sous les fenêtres du maire.
Slogan type : «On n’est pas revenus ici après deux mille ans pour vivre comme des goys».
«Pour eux, c’est sacré, concède Joni, un étudiant usager. Mais on ne peut pas mettre au point mort une métropole juste pour eux.»
Source Liberation
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