Le sort de l'icône du "Miel et les Abeilles", devenue SDF, avait ému les uns, choqué les autres, interrogé tout le monde. Sortie de l'enfer de la rue depuis deux ans et demi, Mallaury Nataf fait le bilan de sa vie et de sa rupture avec la société.......Poignant........
Closer On a appris au mois d'août que vous ne viviez plus dans la rue ...
Mallaury Nataf J'ai vécu cette période comme l'ascension d'une montagne. D'ailleurs il fait très froid dehors... Je me suis vue comme dans un trekking. J'ai beaucoup marché dans toute l'Ile-de-France.
J'ai voulu voir la réalité de la France. J'étais dans la marge et j'ai vu des choses horribles. J'ai désormais un toit. J'ai digéré le choc émotionnel que j'ai eu à traverser.
Vous voulez dire que vous avez assez de recul pour analyser pourquoi vous avez sombré ?
J'ai vécu un choc. Le choc de ma vie ! J'avais abandonné mes activités de comédienne pour être mère au foyer. J'avais choisi de consacrer ma vie à mes enfants.
Pendant quatorze ans, je n'ai pas vécu en dehors d'eux. Mon troisième enfant, Shiloh- Kitavo, 9 ans aujourd'hui, était déjà né quand, en 2011, on m'a enlevé les deux premiers, qui avaient 9 et 12 ans.
Un arrachement. L'effet d'une bombe ! Je n'ai pas supporté... Le choc émotionnel a été tel que je n'ai plus eu envie de m'occuper de quoi que ce soit.
C'est à ce moment-là que vous avez quitté votre foyer ?
Oui, avec Shiloh-Kitavo, qui avait alors 2 ans et demi. Et il m'a été enlevé, lui aussi, un an plus tard, car je vivais dehors, n'ayant pas assez de ressources pour avoir un toit.
Du jour au lendemain, je n'ai plus eu d'enfants. La justice m'a privée de ce que j'avais de plus précieux. C'est inacceptable. C'est inhumain. Comment voulez-vous que je le vive bien !
Pourquoi vous a-t-on enlevé vos aînés, Raphaël et Angéline, nés de deux pères différents ?
J'ai été très amoureuse de mes deux ex-maris et, dans leur esprit, je ne pouvais pas tomber amoureuse d'un troisième.
Ils ont donc été très jaloux de mon nouveau compagnon, Eric-Abraham, le père de Shiloh.
Et surtout du fait qu'il entrait sous mon toit. Car, jusqu'alors, j'avais élevé leurs enfants sans homme.
Pour quelle raison vous en a-t-on privé ?
Quand j'ai appris que j'étais juive, Eric-Abraham l'était aussi, nous avons voulu élever nos enfants dans cette tradition.
Les pères de mes enfants s'y sont opposés. Je suis passée devant une juge qui a donné la garde de mes enfants à leurs pères respectifs.
On m'enlevait ma chair et mon sang. Je n'ai même pas eu la force de réagir, de faire appel...
Vous ignoriez que vous étiez juive ?
Je ne l'ai appris qu'à 36 ans. Pas par ma mère, qui n'a pas osé me le dire, mais qui l'a confié à Eric-Abraham.
Où viviez-vous avant de le rencontrer ?
Dans le 16e arrondissement. Je faisais de la musique, des prestations privées, je recevais des droits à l'image.
Je vivais par moi-même. Aucun des pères n'a jamais donné d'argent, ma famille non plus. C'est toujours moi qui ai payé pour mes enfants.
Et quand Eric-Abraham est entré dans votre vie...
Mes ex-conjoints, comme mes parents, ne l'ont pas accepté. J'étais folle de lui. Il avait dix ans de plus que moi.
Jamais je n'avais présenté un homme à mes parents. Je suis allée aux Etats-Unis pour le faire.
C'est le seul homme qui ait compté pour vous ?
Oui. Et cela a fortement déplu à mon père. Le refus de ce nouvel homme par ma famille avait déjà enclenché un processus psychologique en moi.
Et, quand mes deux premiers enfants m'ont été enlevés, je me suis vraiment écroulée.
J'ai eu l'impression que j'avais un trou dans le cœur, physiquement. On dit qu'on peut mourir d'amour. J'ai failli mourir d'amour.
Vous avez dit un jour qu'Eric-Abraham était lui-même tombé malade...
Il était très impliqué dans l'éducation des mes enfants. Quand mes aînés nous ont été enlevés, il a continué à faire comme si de rien n'était.
Mais il n'était plus le même. Il n'a pas souhaité être suivi médicalement. On était une famille. On l'a brisée.
Le revoyez-vous de temps en temps ?
Je l'ai fait. Il n'était plus, hélas, l'homme que j'avais rencontré.
Qui vous a aidée à retrouver une vie normale ?
Ma mère. Mon beau-père, avec qui elle vit depuis vingt-cinq ans dans le Sud, était à Paris.
Il m'a reconnue alors que j'étais assise sur un muret à l'Opéra. Je l'ai envoyé balader.
Il m'a quand même donné un numéro de téléphone. Quinze jours plus tard, j'ai appelé ma mère, qui m'a trouvé dans les deux heures une colocation.
Pourquoi l'avez-vous appelée ?
J'avais passé trois ans et demi dehors, et un an et demi en colocation à chaque fois que je recevais de petits revenus de droits à l'image.
Quand je n'avais plus d'argent, je repartais dans la rue. Les gens étaient très généreux avec moi.
Et, aujourd'hui, travaillez-vous ?
Par périodes, quand j'ai besoin d'argent. J'aimerais faire de la radio. J'ai une idée d'émission.
Si un directeur des programmes est intéressé... Je me sens aussi prête à tourner un film avec un réalisateur d'avant-garde.
Avez-vous l'espoir de revoir Shiloh ?
Je peux le voir trois heures par an ! On m'a dit : "Il faut que vous récupériez un statut social puissant, que vous recommenciez à rayonner." Une vie stable n'est pas suffisante.
Et vos aînés ?
Ils ont tenté de reprendre contact avec moi. Je leur ai fait parvenir mon numéro de téléphone. Ils n'ont pas osé m'appeler.
Comment avez-vous passé les fêtes de fin d'année ?
Très seule. Par choix. Je n'ai plus envie de partager ma vie avec quiconque.
Source CloserMag
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