dimanche 27 novembre 2016

Les antiques synagogues de la Vieille ville de Jérusalem






La Vieille ville de Jérusalem, libérée il y a tout juste 45 ans, renferme des synagogues à l'histoire plusieurs fois centenaire. Nous vous proposons de remonter le cours de l'Histoire pour en apprendre un peu plus sur ces vestiges d'un passé lointain qui s'inscrit dans le présent.....





La Synagogue Tiferet Israël


Au sud-est de la yéchiva du Kotel, se situe la synagogue ashkénaze Tiféret Israël, édifiée au milieu du 19e siècle, l'une des plus remarquables de la Vieille Ville. Elle porte le nom de son initiateur, le rabbin Israël Friedman de Ruzhin, Admour fondateur de la dynastie hassidique Mriz'in.
Le lieu est aussi connu sous le nom de Shoule Nissan Bek, bailleur de fonds pour l’achat du terrain où devait s’établir auparavant une Église russe à la place de la synagogue.
Propriétaire de la première maison de presse hébraïque de Jérusalem et également architecte, Nissan Bek dirigea en partie les travaux techniques de la construction. Néanmoins, à cause de son financement difficile retardant son achèvement, l’ouvrage dura dix ans. L’empereur François Joseph d’Autriche, en visite dans le pays, touché par les problèmes financiers de la communauté, contribua personnellement à la subvention des travaux.
La synagogue fut finalement inaugurée en 1865, mais ne fut totalement achevée qu’en 1872. L’édifice qui comptait trois étages rivalisait en magnificence avec les autres lieux de culte. Le bâtiment s'élevait à une hauteur de 20 mètres et son dôme arrondi était le plus haut de la Vieille Ville. La coupole peinte en vert, couleur de l’islam, causa une grande agitation chez les musulmans. Elle dut donc être ravalée en 1887, à la demande du baron Edmond de Rothschild.
En 1948, pendant la guerre d’Indépendance, le toit de Tiféret Israël, de par son point de vue unique sur les alentours, servit de poste d’observation et de position importante aux combattants juifs du quartier. Elle se trouva au cœur du face à face entre les forces juives et la Légion arabe. La bâtisse devint une cible privilégiée des canons du roi Abdallah Ier.
Après la prise de la Vieille Ville par les Jordaniens, ceux-ci détruisirent presque toute la synagogue. Le haut dôme et ses murs s’effondrèrent, recouvrant les fondations. Seule subsista une partie de la façade ornée, rappelant celle de l’ancienne synagogue de Baraam en Haute Galilée, probablement à l’origine de son style, ainsi que les ruines d’un bain rituel dans le sous-sol.
Suite à la réunification de Jérusalem en 1967, lors de la reconstruction du quartier juif, la décision fut prise de ne pas rétablir la synagogue, mais d’englober ses vestiges dans un complexe architectural.

Ainsi, les pierres effondrées de la bâtisse furent déblayées et la saleté nettoyée. Ces éléments restants servirent de mémorial à la gloire de l’ancienne maison de prière.
En 2010, la société chargée du développement et de la restauration du quartier juif de la Vieille Ville de Jérusalem décida en fin de compte de promouvoir la reconstruction à l’identique de la synagogue Tiféret Israël. L’architecte israélien d’origine argentine, Carlos Prus, fut chargé de la réalisation du projet. Sur le lieu même de la restauration, on peut voir des panneaux explicatifs et des photos de la synagogue avant sa destruction.


La 'Hourva

Située sur une colline, en plein cœur de la Vieille Ville, la ‘Hourva a une longue histoire. Selon la tradition, Rabbi Yéhouda Hanassi, dès le second siècle, aurait créé un centre d’étude et de prières en ce lieu. Selon d’autres sources, le Rambam aurait étudié à cet endroit.
À partir du XIIIe siècle, la synagogue et sa cour auraient servi à la communauté ashkénaze. Rénovée au début des années 1700, les Arabes mettent le feu à la bâtisse et à son contenu en 1721. La cour est transformée en magasins et la synagogue devient une ruine.
En 1836, les décombres de la cour de la Hourva sont enfin déblayés. Toutefois, les créanciers ottomans bloquent l’avancement des travaux de rénovation. En 1856, grâce à l'intervention personnelle de Sir Moses Montefiore, un décret impérial ottoman autorise la reprise de la construction. Des fonds sont recueillis dans toute la diaspora.

Le 11 avril 1857, la première pierre de l'édifice est posée en présence du grand rabbin de Jérusalem Shmouel Salant. Mais par manque d'argent, il faut huit ans pour que le bâtiment soit achevé. En 1864, enfin terminée, la synagogue est l'une des plus élevées de la Vieille Ville. Son dôme, plus haut que celui de la mosquée du rocher est visible tout aux alentours. Avec son style néo-byzantin, la bâtisse est considérée comme la plus belle et la plus grande synagogue d’Eretz Israël.
Elle devient le centre de la vie spirituelle ashkénaze de Jérusalem.
En 1948, pendant le siège de la Vieille Ville, le commandant jordanien de la Légion arabe, le Major Abdallah El-Tal, prévient la Haganah que si elle n'abandonne pas sa position à l’intérieur de la synagogue, il sera forcé de la bombarder. Moché Russnak, commandant des forces juives en Vieille Ville, ne tient pas compte de cet avertissement, sachant que si la 'Hourva tombe, la bataille pour le quartier juif sera irrémédiablement perdue.
Le 26 mai, la légion jordanienne lance un ultimatum demandant à la Haganah de se rendre dans les douze heures.

Le lendemain, n'ayant reçu aucune réponse, Abdallah El-Tal ordonne à ses hommes de prendre d’assaut la 'Hourva. Plusieurs dizaines de kilos d'explosifs font sauter les murs de la synagogue. Après la victoire jordanienne, le bâtiment est délibérément sapé et brûlé pour la seconde fois. Mais en 1967, Israël réunifie sa capitale. Après 10 ans de délibération, l'une des quatre arches de la synagogue est reconstruite.
Ce mémorial de pierre de 16 mètres de haut devient pendant des décennies l'un des lieux emblématiques du quartier juif de la Vieille Ville. En 2000, après des recherches historiques minutieuses, l’agrément pour la reconstruction de la 'Hourva selon les plans d'origine du XIXe siècle est signé. L’arche est démontée en 2005 pour permettre les travaux de réhabilitation de la synagogue. La nouvelle bâtisse est inaugurée le 14 mars 2010.
Ainsi 62 ans après le saccage de cette synagogue centenaire, voire millénaire, les clés de la Hourva précieusement gardées par le fils de l’ancien trésorier ont enfin été rendues aux autorités israéliennes.

La synagogue Ramban

À l’origine située sur le Mont Sion, hors des murs de Jérusalem, la synagogue Ramban, fondée en 1267 par Na’hmanide, est la plus ancienne maison de prière en activité de la Vieille Ville. Son histoire et sa sainteté se ressentent à travers ses briques et ses arcades.
A plus de 70 ans, arrivant d’Espagne à Jérusalem, Na’hmanide décide d’y rétablir une communauté juive décimée par les invasions tartares, mongoles et mameloukes.

Il restaure, en seulement trois semaines, une maison en ruines, et la transforme en lieu de culte qui porte depuis son nom. Le jour de Roch Hachana, date d’inauguration de la synagogue, l’éminent rabbin prononce un sermon encourageant vivement les nouveaux arrivants à s’établir à Jérusalem. Après la mort de Na’hmanide en 1270, sa maison de prière est rebâtie sur des vestiges romains et byzantins à l’intérieur des murailles de la Vieille Ville, sur la place principale du quartier juif, au coin de la rue Ha-Yéhoudim.
Renfermant dans ses piliers et son mur central des inscriptions paléo-hébraïques ainsi que des voûtes romanes, mais dénué de style gothique ou musulman, le bâtiment d'origine suppose en fait être antérieur à la période croisée. La synagogue reconstruite devient ainsi au 13e siècle, la première maison de prière juive au cœur de Jérusalem.
Durant de nombreuses années, elle demeure la seule au sein de la ville. Pendant près de 300 ans, la synagogue est ainsi fréquentée par les Sépharades et les Ashkénazes qui y prient et y étudient ensemble. Mais en 1474, la bâtisse est détruite par les Musulmans.
 Un peu plus tard, la synagogue Ramban est reconstruite en contrebas, trois mètres en dessous du niveau de la rue, suivant la loi musulmane qui interdit aux lieux de culte juifs d’être plus élevés que les mosquées. Mais en 1588, elle est à nouveau fermée par ordre du sultan ottoman Murad III. Le gouverneur de Jérusalem défend aux Juifs d'y prier. Les suivants transforment le lieu en entrepôt, puis en moulin à farine. Enfin en 1835, l'Empire ottoman permet la rénovation du bâtiment.
La synagogue est dotée de deux arches, apparemment pour permettre à tous les fidèles de les voir sans être cachées. L’absence de fenêtres est frappante. Seule une lucarne est située au-dessus de l'entrée à l'ouest. La pénombre de cette maison de prière servait peut-être aux résidents juifs qui cherchaient à se cacher lors des persécutions au cours des âges.
En 1948, lors de la guerre d’Indépendance, la synagogue Ramban disparait sous les bombes. Les Jordaniens la transforment en dépôt d’ordures et en décharge. En 1967, après la Guerre des Six Jours et la libération de la Vieille Ville, les Juifs y retrouvent leur droit de propriété. 700 ans après la mort du Ramban, sa synagogue est restaurée d’après des photos témoins et des descriptions de voyageurs ayant visité le lieu au 14e et15e siècle. Le bâtiment rouvert accueille à nouveau les nombreux fidèles venant s’y recueillir. Aujourd’hui, cette maison de prière est redevenue un vibrant lieu de culte très fréquenté.


Les quatre synagogues séfarades

En contrebas de la rue Mishmeret Hakéhouna se trouvent les quatre plus belles synagogues séfarades, parmi les plus anciennes de la Vieille Ville. Il s’agit du complexe appelé Ben Zakaï, édifié au 16e siècle par des Juifs réfugiés d’Espagne.
Il comprend les synagogues progressivement réunies et superposées : Ben Zakaï - la plus grande et la plus impressionnante des quatre, Éliahou Hanavi, Kahal Tsion et Istanbul.
 Selon la légende, celle de Yo’hanan Ben-Zakaï, aussi connue sous le nom de Kahal Kadoch Gadol, serait située à l'endroit de la maison d'études du célèbre tanna. La tradition raconte que le sage de la Michna est venu prier en ce lieu à l’époque où il sollicita de Titus, en l’an 70, l’autorisation d’ouvrir une yéchiva à Yavné.
La synagogue Ben Zakaï, fondée au début du XVIIe siècle, repose sur les restes de bâtiments de l'époque croisée. Elle a été édifiée quand la synagogue du Prophète Éliahou, situé à côté, s’est révélée trop petite pour contenir tous les membres de la communauté sépharade.
Le bâtiment est unique pour plusieurs raisons. Afin d'éviter une croix à l'intersection des arcs, chaque croisement est décoré de rosaces et orné de motifs géométriques. Autre fait insolite : la synagogue renferme elle aussi deux arches. Les différentes étapes de sa construction sont visibles dans le mur nord, à gauche de la synagogue. Ses hauts plafonds et sa superficie, impressionnants pour l’époque, donnent une sensation d’espace malgré les apparences modestes du lieu vu de l'extérieur.

La forme de la structure est pittoresque avec ses fenêtres mauresques, son dôme et sa belle porte sculptée. Mais au fil des ans, cette maison de prière, de même que les trois autres, se sont détériorées et des trous béants dans le plafond sont apparus.
Les autorités musulmanes de l’époque n'ont pas autorisé la rénovation des édifices religieux non-musulmans et la situation des synagogues est devenue précaire. En 1935, les Juifs obtiennent la permission du gouverneur d'Égypte en Terre d'Israël, de rénover les sanctuaires.
Pendant la Guerre d'Indépendance, la synagogue Ben Zakaï se transforme en l'un des derniers bastions pour les défenseurs juifs du quartier. Ses murs épais abritent de nombreux habitants durant le long bombardement. Finalement, les quatre édifices sont détruits puis pillés par les forces jordaniennes. Les peintures des arches sont volées et vandalisées. Les synagogues ont ensuite servi d'écuries durant les 19 années de l'administration jordanienne. Après la victoire israélienne de 1967, les lieux de culte sont soigneusement restaurés et rouverts en 1972.

Le complexe abrite désormais un musée présentant des documents sur sa destruction et sa renaissance. On peut aussi y découvrir une chaise consacrée au prophète Éliahou, ainsi qu'une jarre d’huile qui aurait été destinée à l’onction du messie d’Israël et un chofar devant annoncer sa venue. En effet, selon une tradition, c’est là qu’ils sont attendus.
En attendant, la synagogue Yo’hanan Ben Zakaï continue de célébrer son rite hiérosolomytain.



Par Noémie Grynber - En partenariat avec Hamodia.fr


Source Chiourim


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