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mardi 12 avril 2016

« Un Petit Garçon » : grande émotion






Elie Pressmann, auteur et interprète, parle du petit garçon qu’il fut, enfant juif emporté dans le drame de la guerre. A 83 ans, il soulève une émotion sans âge, juvénile, grave, profonde, sincère, qui touche le public de toutes générations. Comment ne pas frémir devant cet homme dont la grâce malgré les décennies est intacte ?....







La silhouette demeure svelte et souple et le visage est semblable à celui de l’enfant qui est sur l’affiche, semblable oui, aussi doux et souriant, hormis quelques rides tendres qui viennent encadrer les joues sous les beaux cheveux blancs. Comment ne pas ressembler à soi-même malgré le passage du temps, cela semble évident ?
Pourtant, dans le cas d’Elie Pressmann, cette ressemblance est plus nette, elle parait avoir défié le temps et pris une délicate revanche sur la cruauté du destin.
Cet homme aurait pu être brisé et assombri et on le retrouve irrésistiblement enfantin, malicieux et charmant. Tel qu’il fut, petit garçon prénommé Elie, vivant à Paris au sein d’une famille aimante et joyeuse dont les trois sœurs ainées l’entourent autant que ses parents d’une affection propice à un avenir heureux.
Seulement voilà, la déclaration de guerre et les lois de 1942 sur le statut des Juifs viennent tragiquement modifier le cours de la vie familiale.
L’exode, la cachette chez une prostituée du sixième étage durant la rafle, puis la fuite en ordre séparé, le passage de la ligne de démarcation, l’accueil par Antoine Besson, un homme merveilleusement bon, dans un village de Savoie, tout cela Elie Presmann le raconte et le met en scène en optant pour le pronom personnel « Il », alors qu’il parle de lui il y a presque soixante-dix ans.
Il se souvient de ces années de guerre et les narre avec ses yeux d’alors, transformant des anecdotes autant que la grande trame de l’histoire en faits parfois cocasses ou en séquences puériles.
On le voit à l’abri à la campagne, rejoint par une partie de la famille mais tenaillé par l’angoisse de l’attente de celle qui fut son premier amour : sa mère. Il la peint avec ses mots, empli des sensations de petit enfant cajolé. Il se souvient de certaines paroles, certaines caresses, des regards, des impressions qui entourent la figure maternelle d'une perfection d’ange. C’est cette mère qu’il n’a cessé de garder blottie en lui mais qu’il n’a jamais revue, morte en déportation.
Un petit Elie Pressmann a travaillé en tant que comédien avec Jean Vilar, Roger Planchon, etc, puis il est venu à l’écriture par la chanson avant d’écrire une vingtaine de pièces, tout en ayant ensuite une activité de conseiller juridique. A nouveau sur scène avec
Le petit garçon, il est ici dirigé par Catherine Hubeau avec toute la simplicité et la pudeur qu’il fallait.
Sans accessoires, juste avec un bureau, une carafe d'eau et un verre, Elie Pressmann témoigne avec son texte d’un pan tragique de l’histoire mais aussi de la force et de l’humour qui peuvent malgré tout perdurer quand des parents et des rencontres avec des êtres beaux, généreux, insufflent l’amour.

Emilie Darlier


Source Artistik Reso