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lundi 25 janvier 2021

De l’eau dans le gaz entre le Hezbollah et Damas ?


Téhéran et le mouvement terroriste chiite Hezbollah ne verraient pas du tout d’un bon œil les informations qui ont fuité concernant des contacts entre le régime Assad et Israël......Décryptage.......

Entre le régime syrien et l’axe Hezbollah-Téhéran, les relations n’ont jamais été au beau fixe, malgré l’alliance stratégique qui les unit. 
Mais les rapports entre les deux alliés se seraient récemment dégradés davantage en raison de contacts diplomatiques, par le biais de Moscou, entre la Syrie et Israël. 
Le discours du secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, le 9 janvier, dans lequel il a insisté pour que la vérité soit faite sur la double explosion dévastatrice au port de Beyrouth a été interprété par les analystes locaux comme une façon de mettre la pression sur le régime syrien. 
Quelques jours après, la chaîne al-Jadeed a sorti une enquête dans laquelle elle révèle l’implication de trois hommes d’affaires syriens proches de Bachar el-Assad dans l’importation des 2 700 tonnes de nitrate d’ammonium au port de Beyrouth. Deux jours plus tard, un message vocal, faisant état de l’explosion d’une quantité de nitrate d’ammonium dans la banlieue sud de Beyrouth et de plusieurs morts parmi des responsables du Hezbollah, a circulé massivement sur les téléphones des Libanais. Si certains médias ont rapporté l’information, celle-ci n’a jamais été officiellement confirmée. 
Mais les milieux proches du Hezbollah ont vu dans la diffusion de cette rumeur un message codé du régime syrien au Hezbollah, selon lequel un attentat pourrait bien se produire dans la banlieue sud de Beyrouth si jamais Damas était tenu pour responsable de la double explosion du 4 août. 
Les informations sur une certaine tension entre le parti de Dieu et le régime Assad sont confortées par les critiques récemment formulées par des médias proches du Hezbollah à l’égard de Damas au sujet de la contrebande de mazout, de médicaments, voire même de dollars, qui profite essentiellement, selon elles, au régime syrien, au détriment des Libanais qui en ont réellement besoin.

Les contacts syro-israéliens

Mais c’est surtout les informations diffusées le 18 janvier par un centre d’études syrien, Jusoor for Studies, basé en Turquie, sur une réunion syro-israélienne à la base aérienne russe de Hmeimim, près de Lattaquié, à l’initiative de Moscou, qui auraient déclenché immédiatement une petite tornade dans la sphère syro-iranienne. 
Et pour cause : une telle démarche va à l’encontre des orientations de Téhéran pour qui tout rapprochement entre ces deux pays en guerre impliquerait automatiquement un grignotage de ses zones d’influence en Syrie et affaiblirait sa position dans la région, notamment au Liban qui assure à l’Iran une voie d’accès à la Méditerranée. 
De source diplomatique russe, on assure à L’OLJ que la réunion de Hmeimim n’a pas eu lieu. Elle était supposée se tenir, mais elle a été ajournée à partir du moment où l’information a été fuitée « exprès ». 
Damas accuse l’Iran d’être derrière la fuite, ce que des sources de l’opposition syrienne, en contact avec Moscou, confirment en expliquant que la réunion de Hmeimim s’inscrit dans le prolongement d’une série de rencontres de sécurité syro-israéliennes qui s’étaient tenues l’année précédente à Paris et à Moscou. Toujours selon les mêmes sources, la dernière réunion entre Syriens et Israéliens avait eu lieu il y a quelques semaines à Chypre. 
Celle de Hmeimim était en voie de préparation, mais les fuites médiatiques ont entraîné son ajournement. 
Selon les mêmes sources, Damas et Tel-Aviv ont commencé depuis quelques années à échanger des messages, par l’intermédiaire de Moscou, au sujet notamment de la situation dans le secteur du Golan. L’objectif de ces échanges est de parvenir à trouver un modus vivendi susceptible de soustraire cette zone à l’influence iranienne.
C’est dans cet ordre d’idées que s’inscrivent, selon un diplomate occidental, les réunions tripartites qui se poursuivent depuis plusieurs mois entre des responsables syriens et israéliens en présence d’officiers de la Force des Nations unies chargée d’observer le désengagement (Fnuod), basée au Golan. 
Ces assises ambitionnent, précise la source, de parvenir à une entente qui repose principalement sur un élargissement du champ d’action des Casques bleus de la Fnuod, de manière à maintenir le Golan, et la ville de Quneitra plus particulièrement, à l’abri de l’influence iranienne.
En décembre dernier, le commandant de la Fnuod, le général Ishwar Hamal, avait effectué une visite à Beyrouth où il avait eu des entretiens notamment avec le commandant en chef de l’armée, Joseph Aoun, et le directeur de la Sûreté générale, Abbas Ibrahim, sur des questions d’intérêt commun, en rapport selon toute vraisemblance avec la situation au niveau des frontières.

La réponse du Hezbollah

Le parti de Hassan Nasrallah dément, lui, formellement tout conflit avec le régime syrien. Même si, dans ses milieux, on reconnaît qu’il y a eu à certains moments des divergences de vue politiques, on fait valoir surtout la complémentarité stratégique avec Damas. 
L’Iran et la Syrie ont chacun besoin de l’autre, estime-t-on dans ces milieux, où l’on va jusqu’à considérer que la Russie a également besoin des forces iraniennes en Syrie, même si l’entente n’est pas parfaite entre les deux. 
Téhéran et Moscou divergent sur plusieurs questions stratégiques, comme le partage des zones d’influence ou encore la position de la Russie par rapport aux raids israéliens qui se sont récemment amplifiés contre des objectifs iraniens en Syrie, l’Iran reprochant à la Russie de fermer les yeux, voire de cautionner ces attaques.
Tout en minimisant l’impact des divergences avec la Syrie, le Hezbollah ne cache pas qu’il mise sur une reprise des négociations américano-iraniennes sous la nouvelle administration du président Joe Biden. Il considère que l’Iran ne peut que sortir politiquement gagnant de ces pourparlers. 
Téhéran, indique un proche de la formation chiite, s’efforcera d’œuvrer pour retourner à la situation qui prévalait sous Barack Obama.
C’est sur la base de cette analyse qu’on balaie dans les milieux du Hezbollah les intentions attribuées à son chef dans son dernier discours. Les accusations indirectes à Damas qu’on lui impute, qu’il s’agisse de l’affaire de la double explosion au port ou de celle de la contrebande, constituent en elles-mêmes une matière explosive qui risque de lui sauter à la figure.
Mais de l’avis de certaines figures de l’opposition syrienne, les éléments de désaccord entre l’Iran et la Syrie sont en train de s’accumuler. 
C’est dans ce cadre qu’interviennent des reproches formulés par des parties proches de l’Iran et du Hezbollah à l’égard du régime syrien qu’elles jugent noyauté à plus d’un niveau de la hiérarchie. 
Pour ces parties, c’est ainsi que des informations sont filtrées, permettant aux Israéliens d’être plus précis au niveau du ciblage de leurs objectifs en Syrie.
Alors que la présidentielle syrienne doit se dérouler cette année, Bachar el-Assad pourrait avoir intérêt à prendre ses distances avec les Iraniens afin de se rapprocher des pays arabes et occidentaux. 
C’est en tout cas ce que pensent une source diplomatique occidentale et une autre du Golfe qui, tout en confirmant les négociations syro-israéliennes et la volonté de Bachar el-Assad de renflouer son régime, estiment que ce dernier est parfaitement capable de verrouiller certaines zones devant les Iraniens, de se rapprocher davantage de Moscou et de fournir davantage d’informations sur la présence iranienne sur son territoire. 
En contrepartie, le président syrien réclamerait un appui arabe et occidental à cette démarche, ce qui n’est pas assuré pour l’heure et qui justifie, selon les mêmes sources, le retour de Bachar el-Assad à son jeu traditionnel qui consiste à faire chanter aussi bien ses alliés que ses adversaires.

Source L'Orient le jour
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