Depuis plusieurs semaines, des milliers d’Israéliens descendent dans la rue pour manifester contre le Premier ministre Benjamin Netanyahu. Ils réclament sa démission en raison de sa gestion de l’épidémie de Covid-19, qui progresse dans le pays, et des soupçons de corruption qui pèsent sur lui.
Samedi 1er août, des manifestations ont à nouveau eu lieu dans plusieurs villes du pays contre le chef du gouvernement.
Certains protestataires se sont même rassemblés devant la résidence de Benyamin Netanyahu, à Jérusalem.
Pour comprendre les enjeux de cette mobilisation qui a pris de l’ampleur en juillet, France 24 a interrogé Frédéric Encel, géopolitologue et maître de conférence à Sciences Po Paris.
France 24 : Depuis de nombreuses semaines, des milliers de manifestants anti-Netanyahu sont mobilisés dans les rues du pays. Quel est leur profil et quelles sont leurs motivations ?
Frédéric Encel : Contrairement à ce que l’on pourrait croire, à cause du contexte de crise économique provoquée par la situation sanitaire, la majorité des manifestants n'est pas issue des couches les plus populaires.
Et il ne faut pas croire non plus que ces manifestations ont pour seul ressort la crise sociale ou la gestion de l’épidémie de coronavirus.
Fondamentalement, les personnes qui se sont mobilisées, notamment des membres de la petite ou moyenne bourgeoisie, elles-mêmes marquées par la crise, sont descendues dans la rue pour exprimer leur rejet, voire parfois leur détestation, du personnage Benjamin Netanyahu, davantage que pour protester contre sa stratégie économique.
Quelle que soit la génération des manifestants, c’est une question personnelle au sens où ils considèrent le Premier ministre, qui fait face à trois mises examen pour des accusations tout à fait graves, comme un dirigeant corrompu, prévaricateur, et népotiste.
Et ce, sans compter l’usure du pouvoir, après douze ans passés au poste de chef du gouvernement. Pour résumer, ils expriment un certain ras-le-bol de Benjamin Netanyahu, au pouvoir sans discontinuer depuis 2009.
Ce mouvement peut-il avoir des conséquences politiques ?
Les manifestations peuvent perdurer, voire même prendre de l’ampleur, mais elles risquent surtout de rester lettre morte puisque Benjamin Netanyahu n’a aucune intention de démissionner.
Certainement pas après avoir réussi à se maintenir au pouvoir démocratiquement, en étant mal mais malgré tout réélu, c’est le jeu de la démocratie israélienne.
Son gouvernement a été mis en place pour 18 mois, et a priori, à moins d’un cataclysme politique, il a très peu de chance de tomber.
D’autant plus que son principal rival, Benny Gantz est aujourd’hui son principal partenaire. Or, en dehors de cette coalition, Benny Gantz ne pèse plus très lourd sur l’échiquier depuis sa défection du mouvement Bleu Blanc, dont il était la tête d’affiche lors des dernières législatives.
Avec désormais moins de 15 députés, il est très faible politiquement, et ne représente plus une menace pour Benjamin Netanyahu.
Quel impact peuvent avoir ces manifestations sur l’image de Benjamin Netanyahu, déjà écornée par les affaires judiciaires ?
Fort de son expérience, après tant d’années en politique, Benjamin Netanyahu ne se soucie plus de son image, d’autant plus qu’il est censé quitter le pouvoir dans quinze mois.
C'est un insubmersible qui maîtrise tellement son image et la communication. Il le démontre en se faisant réélire quasiment à chaque fois en dépit d'actualités peu reluisantes, notamment sur le plan judiciaire.
Je pense que ces manifestations, sont certes embarrassantes pour son image, mais elles n’auront qu’un impact limité sur son image, sachant qu’il a connu pire comme mobilisation, notamment avec les grèves et le grand conflit social de 1996.
Source MSN
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