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dimanche 24 mars 2019

Pompeo : "Les Libanais doivent faire face au Hezbollah qui met le Liban et son peuple en danger"


Le secrétaire d'Etat américain Mike Pompeo a dénoncé vendredi les "activités déstabilisatrices" du Hezbollah, appelant les Libanais à "faire face" au parti chiite qui "met le Liban et son peuple en danger". Le chef de la diplomatie US a fait ces déclarations lors d'une visite à Beyrouth, dernière étape d'une tournée régionale qui l'a conduit en Israël et au Koweït, axée sur la création d'un front régional contre l'Iran, ennemi juré des Etats-Unis........Décryptage.........



A l'issue d'un entretien avec son homologue libanais Gebran Bassil, M. Pompeo s'est livré, lors d'un point presse au palais Bustros, à une violente attaque contre le Hezbollah, mettant en garde contre le "danger" qu'il représente. 
"Le Hezbollah met le Liban et son peuple en danger par ses décisions téléguidées par l'Iran", a-t-il affirmé, dénonçant le fait que le parti dispose d'armes de missiles. 
"Comment, dans ce cadre, le Hezbollah peut-il défendre les intérêts des habitants du Liban-Sud et de la Békaa ?", s'est-il interrogé. 
"Les Libanais doivent faire preuve de courage et faire face au Hezbollah", a-t-il lancé, tout en assurant que Washington allait continuer à "soutenir le Liban, son peuple et ses institutions".
"Le Hezbollah fait obstacle aux espoirs du peuple libanais. C'est en intimidant directement les électeurs qu'il est présent au Parlement, en faisant croire qu'il soutient l’Etat. 
Les campagnes du Hezbollah sont contraires aux intérêts du peuple libanais", a insisté M. Pompeo, soulignant que "le parti chiite vole les ressources de l’Etat. Et de poursuivre : "L'Iran ne veut pas que cette situation change. Elle voit dans la stabilité du Liban une menace à ses aspirations de domination", ajoutant que "les sociétés iraniennes et les tentatives de l'Iran à blanchir de l'argent mettent le Liban dans le viseur la lois internationales".
M. Bassil s'est pour sa part félicité "d'un dialogue constructif et positif" mais a admis des divergences de points de vue sur le Hezbollah et espéré qu'elles n'affecteront pas les relations bilatérales. 
Lors d'une conférence de presse conjointe, M. Bassil a affirmé que "le Hezbollah est un parti libanais qui n'est pas terroriste, qui bénéficie d'une assise populaire et qui a des députés élus". 
"Nous ne voulons pas que ce sujet ait des conséquences sur nos relations mutuelles", a-t-il espéré, assurant que "la stabilité et l'unité du Liban sont dans l'intérêt du Liban, des Etats-Unis et du monde". 
"Nous sommes attachés au droit du Liban à la résistance", a-t-il ajouté.
Le Hezbollah, financé et armé par Téhéran, est à la tête de trois ministères dans le nouveau gouvernement libanais. 
Les Etats-Unis considèrent le Hezbollah comme une organisation "terroriste" et un supplétif de Téhéran et imposent une batterie de sanctions contre ses membres et les personnes ou entités qui entretiennent des liens avec la formation chiite.

"Parti libanais"

Le président de la République Michel Aoun ainsi que le président de la Chambre Nabih Berry ont eux aussi pris la défense du Hezbollah face aux attaques du chef de la diplomatie US. 
Ce dernier a "insisté, à l'issue d'une réunion avec M. Berry sur les préoccupations des Etats-Unis concernant les activités déstabilisatrices du Hezbollah au Liban et dans la région et les risques qu'elles représentent pour la sécurité, la stabilité et la prospérité du Liban", a indiqué son porte-parole Robert Palladino.
Nabih Berry a répondu à son interlocuteur que le Hezbollah "est un parti libanais présent au sein du Parlement et du gouvernement". 
Il a également justifié son recours aux armes en dehors du cadre de l'Etat, affirmant que "sa résistance est le résultat de l'occupation israélienne de territoires libanais jusqu'à ce jour".
Commentant les sanctions américaines, Nabih Berry a dit à M. Pompeo que "les lois votées par le Parlement libanais sont conformes aux lois internationales et assurent la transparence de toutes les transactions financières".
MM. Pompeo et Berry ont en outre discuté de "la nécessité de maintenir le calme le long de la frontière entre le Liban et Israël", a ajouté M. Palladino. 
Les discussions ont également porté sur l'importance de préserver la stabilité au Liban et la nécessité de régler le contentieux autour des frontières maritimes entre le Liban et Israël, notamment celui concernant la zone économique exclusive (ZEE) du Liban, à la lumière de l'exploitation des ressources en hydrocarbures offshore dans la zone. 
Mike Pompeo a fait savoir que les Etats-Unis sont prêts à aider à régler ce contentieux, avec l'aide des Nations unies.
Lors de sa conférence de presse commune avec M. Pompeo, M. Bassil a lui aussi insisté sur la préservations des droits territoriaux du pays. 
"Le Liban a une opportunité de recouvrer sa terre sans faire de concession", a-t-il déclaré, appelant les Etats-Unis à contribuer à faire cesser les violations israéliennes de la souveraineté du Liban. 
Concernant l'exploitation des ressources hydrocarbures offshore, M. Bassil a appelé les entreprises américaines à participer aux appels d'offre, estimant que cela favoriserait "la stabilité et la prospérité du Liban". "Le Liban, dans sa diversité et son ouverture, peut travailler avec tout le monde", a-t-il déclaré.
Israël et le Liban sont toujours techniquement en guerre. Des escarmouches ont parfois lieu le long de la "Ligne bleue" de cessez-le-feu, gardée par l'ONU depuis le retrait des troupes israéliennes du sud du pays en 2000. 
En 2006, Israël et le Hezbollah se sont livré une guerre dévastatrice de 33 jours.

Réfugiés syriens

Au palais présidentiel de Baabda,  Michel Aoun a de son côté affirmé, en recevant Mike Pompeo, que "la préservation de l'unité nationale et de la paix civile est une priorité pour nous", ajoutant que "le Hezbollah est un parti libanais bénéficiant d'une assise populaire qui représente l'une des principales communautés du pays".
Le président Aoun a par ailleurs demandé aux Etats-Unis "d'aider le Liban à rapatrier les déplacés syriens dans des zones sûres en Syrie", assurant que les opérations de retour organisées par la Sûreté générale allaient se poursuivre. Le président a dans ce cadre transmis à M. Pompeo une carte montrant la présence massive de plus d'un millions de réfugiés syriens sur l'ensemble du territoire libanais.
Selon notre correspondante Hoda Chedid, le directeur général de la Sûreté générale, le général Abbas Ibrahim, qui assistait à l'entretien, lui a transmis un rapport détaillé sur le mécanisme d'organisation du retour des réfugiés syriens mis en place par la SG depuis mai dernier, indiquant que 175 000 réfugiés étaient retournés chez eux et que d'autres rapatriements suivront. 
M. Ibrahim a en outre assuré que la SG suit de près la situation des Syriens retournant chez eux, soulignant qu'elle n'avait reçu aucune information sur des pressions dont ils seraient victimes.
Lors de son point de presse, le secrétaire d'Etat américain a déclaré que son pays était en faveur d'un retour  des réfugiés syriens le plus rapidement possible.
M. Aoun a par ailleurs salué le rôle des Etats-Unis dans le tracé des frontières terrestres et maritimes, assurant l'engagement du Liban au respect de l'application de la résolution 1701 afin de préserver la stabilité malgré les violations israéliennes.
Dans le cadre de sa tournée auprès des responsables libanais, le chef de la diplomatie américaine s'est également entretenu avec le Premier ministre, Saad Hariri, auprès duquel il a souligné l'importance "du partenariat entre les États-Unis et le Liban en matière de sécurité". 
Il a également insisté sur "la nécessité (pour les Etats-Unis) de continuer à soutenir les institutions légitimes de l'Etat", en référence à l'aide financière et l’entraînement fournis par Washington à l'armée libanaise, a indiqué M. Palladino.
Le chef de la diplomatie US a ensuite reçu le leader druze Walid Joumblatt, ainsi que le chef des Forces libanaises, Samir Geagea au siège de l'ambassade américaine à Awkar.
En soirée, il a été reçu à dîner par le député Michel Mouawad, un événement auquel ont été conviés de nombreux responsables et leaders libanais de tous bords.
Mike Pompeo était arrivé vendredi peu après 11h à l'aéroport international de Beyrouth. 
Il avait entamé sa visite par un entretien avec la ministre de l'Intérieur, Raya el-Hassan, à Sanayeh. 
Selon la chaîne LBCI, ils ont discuté de la crise des réfugiés syriens. Mike Pompeo a également abordé la question du soutien matériel américain aux forces de sécurité libanaises et au ministère de l'Intérieur. 
Le responsable américain a en outre insisté sur la nécessité de mener des réformes au Liban à la lumière de la conférence de CEDRE.

"Une organisation terroriste. Point final"

Le chef de la diplomatie US est arrivé au Liban après une visite de deux jours en Israël au cours de laquelle le président américain Donald Trump s'est prononcé sur Twitter en faveur d'une reconnaissance de la souveraineté d'Israël sur la partie occupée du plateau du Golan syrien. 
Israël a conquis en 1967 une grande partie du Golan et l'a annexée en 1981, mais la communauté internationale n'a jamais reconnu cette annexion. L'appel de M. Trump a suscité une vague de réactions indignées au Liban et dans le monde arabe et fait craindre une montée des tensions dans la région.  
Il y a quelques semaines, l'Etat hébreu a accusé le Hezbollah d'établir secrètement un réseau militaire dans la partie non occupée du Golan.
Le Hezbollah n'a d'ailleurs pas tardé à réagir aux déclarations de Mike Pompeo par l'intermédiaire d'un dignitaire religieux. 
"Qu'est-ce que les Libanais attendent de l'Amérique et de son ministre des Affaires étrangères après ces deux annonces totalement biaisées en faveur d'Israël, à part une incitation" à la division du peuple libanais, s'est interrogé, Ali Damuch lors de son prêche vendredi.
M. Pompeo avait d'ailleurs pris soin de donner le ton de sa visite bien avant son arrivée.  
En déclarant, jeudi depuis Israël, qu’"il regrette le fait que l’ancienne administration américaine ait fait montre d’indulgence en s’abstenant de freiner le Hezbollah", le responsable américain a rappelé on ne peut plus clairement l’objectif de sa tournée à Beyrouth : poursuivre la politique d’endiguement de l’Iran et de son bras armé libanais inaugurée par son administration.  
"Nous n’échouerons pas dans notre entreprise visant à réduire l’influence de l’Iran en Irak, en Syrie et au Yémen", a encore dit M. Pompeo quelques heures avant son départ pour le Liban, estimant que le Hezbollah était une menace pour la stabilité du Moyen-Orient. 
"Le Hezbollah est une organisation terroriste. Vous me demandez à quel point je vais être dur? C’est une organisation terroriste. Point final."
La mission ardue du chef de la diplomatie américaine, qui compte vraisemblablement maintenir le même niveau de pression exercée par son gouvernement sur les responsables libanais, "pourrait rencontrer une résistance même parmi les alliés des Etats-Unis, qui craignent qu’en forçant la pression, cela pourrait provoquer une réaction hostile (de la part du Hezbollah) mettant en danger un pays à la paix fragile", notait néanmoins jeudi le Washington Post dans un article.

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