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lundi 29 janvier 2018

Nisso Bitran, Adieu l'artiste !


Après la dramatique disparition de Nisso Bitran dans l'incendie de sa maison, la semaine dernière, on s'interroge, on s'étonne : «C'était le monsieur au gilet jaune qui marchait beaucoup, tous les jours, par tous les temps, en se servant de 2 parapluies en guise de bâtons ? Non, on ne savait pas grand-chose de sa vie»......Détails.......


Les habitants de la commune de Montesquieu le voyaient en effet souvent sur les routes de la plaine de Béquin et les coteaux du village. «On se rencontrait en promenant nos chiens, se souvient Annie.
J'ai appris à le connaître grâce à nos animaux, il aimait répéter comme une incantation poétique le nom de mon chien, «Forever, forever».
Car poète, original et bohème, il l'était.
Plutôt solitaire et réservé, il s'arrêtait parfois en traversant le village pour bavarder avec le maire : «Il était content, le courant quasi fraternel passait bien entre nous», confie Alain Polo.
Nisso Bitran menait une si discrète retraite dans son manoir au bord du canal que beaucoup ignoraient combien sa vie et sa carrière avaient été remarquables.
En 1944, Nisso a 8 ans. Il appartient à une famille juive orientale originaire de l'Empire ottoman.
Son père Hazkia, né à Istanbul en 1909, est arrêté dans la rafle du café «Le Bosphore» à Paris, où se réunit la communauté judéo-espagnole, et déporté dans un camp, mais le reste de la famille cachée dans un petit village est épargné.

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Très tôt, il s'intéresse à la musique et joue de la guitare. Sa mère échangeait cette «plaisanterie» avec la maman de Charles Aznavour qu'elle voyait au hammam juif : «Mon fils ne sera jamais musicien», et son amie soupirait : «Le mien ne sera jamais chanteur !».
Nisso sera l'élève d'Ida Presti, la guitariste prodige qui jouait en duo avec Alexandre Lagoya, et pour Nisso, Andrés Segovia était «un dieu vivant». Il commença une carrière prometteuse aux États-Unis, à Youston au Texas, étonnamment d'abord comme flûtiste, et «avec beaucoup de courage et d'humanité, il donnait des concerts dans les prisons, dans la section des femmes et des condamnés à mort, ainsi que dans des temples noirs, et cela malgré les menaces racistes», témoigne sa fille Maria.
Il fut obligé de renoncer peu à peu à ses concerts, en raison de problèmes de santé.
Il devint professeur de guitare classique (il savait également jouer du luth et de la viole de gambe) aux Conservatoires de Suresnes, de Sarcelles, Saint-Denis et fut, comme en témoignent ses anciens élèves dont certains sont à leur tour devenus musiciens et professeurs de guitare, un «infatigable pédagogue», un excellent professeur qui les confirmait dans leur vocation.
Frédéric Vitiello, «musipoète» et enseignant de musique à Lorient, témoigne et en parle avec beaucoup d'affection : «J'ai suivi ses cours de 68 à 73 à Saint-Denis pendant cinq ans ; il a été un professeur très important pour ma carrière, très attentif ; il consacrait beaucoup de temps aux autres, je dirais presque un sacerdoce. Je le considérais comme une personne de la famille.
Quand j'ai continué mes études musicales au Conservatoire à Nice, ce fut très difficile et je n'ai tenu que grâce à M. Bitran».
Bel hommage pour une belle personne qui mena une vie artistique intense et qui n'a laissé que de bons souvenirs.

Source La Depeche du Midi
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