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dimanche 30 octobre 2016

Antiterrorisme : le juge israélien qui inspire les politiques français...




Nathan T.* est un juge militaire. Béret soigneusement plié sous le galon de son épaule gauche, ce colonel israélien né en France préside la Cour d’appel de Judée-Samarie. Il maîtrise parfaitement les rouages de la détention préventive, l’un des piliers de la lutte antiterroriste israélienne....





Depuis quelques mois, le juge reçoit la visite de nombreux responsables politiques de la droite française : Georges Fenech,Roger Karoutchi ou encore Pierre Lellouche – trois soutiens de Nicolas Sarkozy – sont venus cet été étudier en détail ce mécanisme administratif et judiciaire. Même les centristes s’y mettent !
La semaine dernière, le juge a reçu la visite d’Hervé Morin (Nouveau Centre), soutien de Bruno Le Maire.
L’ancien ministre de la Défense, devenu président de la région Normandie, qui plaide depuis juillet pour une « israélisation de la sécurité », est lui aussi convaincu qu’une détention préventive à la française est possible, sans devoir renoncer à l’État de droit : « Ce système peut largement être transposé dans le droit français dès lors qu’il fait l’objet d’un contrôle par le juge dans son application », défend Hervé Morin, qui a été confronté au terrorisme dans sa région avec l’assassinat du père Hamel.

Imminence d’un danger

« Loups solitaires, attaques de lieux de culte, de policiers, de terrasses, de salles de concert…, la France connaît le même spectre d’attaques terroristes que l’on voit ici », avance le magistrat israélien, avant de détailler la philosophie du système.
« Personne ne peut prétendre savoir ce qui va se passer à l’avance. En revanche, on peut avoir des sources de renseignements qui vous indiquent l’imminence d’un danger », avance-t-il. Et de poursuivre avec l’exemple – classique – de services de renseignements interceptant une conversation où un individu surveillé explique à son interlocuteur qu’il part, qu’il va devenir martyr, et lui confie son testament.
« Il y a un risque imminent, nous devons donc l’interpeller. À partir de ce moment, nous aurons vingt-quatre heures pour le déférer devant un juge judiciaire. Si ce délai ne permet pas de récolter des preuves judiciaires, nous basculerons, avec l’accord du ministre de la Défense, sur une procédure administrative. Nous disposerons alors de quarante-huit heures pour le déférer devant un tribunal administratif. »

Preuves secrètes

Cette cour est habilitée à étudier les preuves secrètes « multiples et crédibles » produites par les services de renseignements. Limite du système : ces preuves secrètes ne peuvent être produites directement devant la défense de l’accusé. Elles sont donc « paraphrasées » par les services de renseignements et communiquées à un avocat assermenté qui en transmet à son tour le contenu à l’avocat de la défense.
La peine prononcée ne peut excéder les six mois, renouvelables. « Au final, les détentions excèdent rarement plus de deux ans », explique le juge, qui refuse toute comparaison avec Guantánamo : « Guantánamo est né d’une situation extra-légale.
Ici, nous avons une procédure législative rigoureuse, avec des preuves, des avocats et des recours possibles pour tous les condamnés. On est très loin de l’arbitraire », avance le juge.

Empêcher le passage à l’acte

La détention préventive israélienne n’a pas vocation à neutraliser à vie toute personne considérée comme potentiellement dangereuse. Elle permet uniquement d’empêcher un passage à l’acte et de gagner du temps pour régler la situation.
« En l’état actuel, le droit français place souvent les services de renseignements face à un dilemme : agir et risquer la situation extra-légale ou attendre l’apparition de preuves juridiques et risquer un passage à l’acte… » explique Nathan T. Le nombre de personnes incarcérées préventivement en Israël varie au gré des tensions et des attaques. En mai 2014, près de 200 personnes étaient en détention préventive. En juin 2014, elles étaient près de 450, avant de passer à 370 fin 2015.
Aujourd’hui, 629 personnes sont en rétention administrative. Après sa rencontre avec le juge Nathan T., Hervé Morin rêve d’une grande loi antiterroriste en France : détention préventive, autorisation du port d’arme pour les policiers et militaires retraités, décloisonnement des services de renseignements… Certains désirs de réformes prennent des airs de révolution.


* Le prénom a été modifié


Source Le Point


Source Tribune Juive


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