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vendredi 11 septembre 2015

Paracha Nitsavim :Vous vous tenez tous devant l’Eternel

 
Le dernier Chabbat de cette année, nous lisons la paracha de Nitsavim, dans laquelle sont rapportées les paroles de l’Alliance que Moché scella durant les dernières heures de sa vie, entre le Saint béni soit-Il et le peuple d’Israël... 



Rachi (verset 11) cite à ce sujet un Midrach, selon lequel cet ultime rassemblement, survenant peu avant la mort de Moché, était dû au fait que le peuple allait prochainement être soumis à l’autorité Yehochoua, le successeur de Moché. De ce fait, le peuple fut rassemblé pour entendre des paroles de réconfort et d’encouragement.
 Dans le verset par lequel débute cette paracha, nous trouvons une singularité qui mérite réflexion. La Torah annonce tout d’abord : « Vous vous tenez ici tous » – soulignant la présence de l’ensemble du peuple juif. Ensuite, le verset détaille les personnes présentes : « Vos chefs de tribus, vos anciens, vos préposés… ». Puis la Torah semble revenir sur l’ensemble de la population : « … tout membre du peuple juif » (Dévarim 29, 9).
 Dans le même ordre d’idée, le Maor Vachémech relève une autre anomalie : ce premier verset de notre paracha est entièrement tourné à la forme plurielle : « Vous vous tenez tous ici (…) vous tous (…) vos anciens ». Or, les versets suivants passent soudain au singulier : « Pour te faire entrer dans l’Alliance (…) par lesquels il traite avec toi en ce jour ». Que signifie cette exception ?


Tout Israël est garant l’un de l’autre

Cet accent que le verset place sur le rapport collectivité-particulier s’explique par un commentaire de nos Sages (rapporté par Rachi ibid. 29), selon lequel cette Alliance scella un devoir de réciprocité au sein du peuple juif. Dorénavant, chacun n’est plus seulement tenu responsable de ses propres actes, mais aussi de ceux de l’ensemble de la nation.
Ce principe a de nombreuses implications halakhiques. Par exemple, nos Sages enseignent qu’une personne qui a déjà accomplie une mitsva, peut néanmoins la réitérer pour rendre quitte un autre Juif. A cet égard, le premier peut même prononcer la bénédiction : « Qui nous a sanctifiés par Ses commandements et nous a ordonné d’accomplir cette mitsva », bien qu’il en soit déjà quitte, dans la mesure où il a effectivement l’ordre de se soucier que l’autre réalise cet acte. En clair, le devoir de l’autre devient son propre devoir !
Réciproquement, chaque Juif doit être conscient du fait que ses fautes influent et portent atteinte à la totalité du peuple d’Israël. Nos Sages disent à ce propos dans le Midrach : « ‘Hezkia a enseigné : “Israël est un troupeau d’agneaux dispersé“ (Jérémie 50, 17) – pourquoi Israël est-il comparé à un agneau ? De la même manière que l’agneau, lorsqu’on le frappe sur la tête ou sur tout autre membre, c’est tout son corps qui ressent le coup, ainsi Israël, un seul Juif faute et toute la nation le ressent » (Vaykira Rabba 4, 6).
Nos Sages citent à ce propos une parabole admirable : « Ceci est à l’image d’hommes voyageant en bateau. Soudain, l’un d’eux saisit une pioche et se met à percer le navire sous son siège. Les autres lui disent : “Que fais-tu donc ?“. Il leur répond : “Qu’est-ce que cela peut bien vous faire ? Ne suis-je pas en train de creuser sous ma place ?“. Mais ils lui rétorquent : “Mais l’eau de ton trou finira par envahir tout le bateau !“ ».
Entre les membres du peuple juif, il existe un lien spirituel établissant une corrélation tangible entre eux, exactement comme les organes d’un même corps. C’est la raison pour laquelle nous disons par tradition que lorsqu’un élève d’une yéchiva réduit l’ardeur ou l’assiduité de son étude, il influe directement sur un autre Juif, à l’autre bout du monde, qui s’interroge sur ses attaches au judaïsme.
 

L’union et la solidarité

Cette spécificité qui fait toute la différence entre un particulier et une collectivité expliquera le sens de cet adage d’Hillel l’Ancien, dans les Maximes de Pères : « Si je ne suis pas là pour moi, qui le sera ? Et lorsque je suis à moi, que suis-je ? » (1, 14).
Ceci signifie que chaque être humain est un monde à part, composé de droits, de devoirs et de responsabilités uniques et spécifiques. A cet égard, nul ne saurait remplir à sa place la mission qu’autrui est tenu d’accomplir ici-bas, et jamais quiconque ne parviendra à le supplanter dans son rôle sur terre.
Ceci étant, lorsqu’un particulier s’associe à la collectivité dans l’accomplissement de sa tâche, celle-ci prend alors une valeur nettement supérieure, qu’il ne connaîtra pas tant qu’il se cantonnera à sa force personnelle et individuelle. Le Imré Emet écrivit à ce sujet : « “Vous tous (…) vos chefs de tribus (…) tout membre du peuple“ – voici comment l’on interprète ce verset selon l’une des treize règles d’exégèse : “Lorsqu’une généralité est suivie de la précision d’un détail, la généralité est conforme au détail“. De même, lorsque le peuple d’Israël se rassemble et s’unit, chacun de ses membres peut devenir l’égal de ses “chefs de tribus“ ».
Le Sfat Emet poursuit en ce sens : « “Vous vous tenez tous ici“ – aujourd’hui et jusqu’à la fin des temps, tant que chacun s’insère dans l’assemblée, parce que l’assemblée se tient toujours devant D.ieu ».


Bénis-nous tous ensemble

Ces réflexions prennent une connotation beaucoup plus intense en ces périodes précédant les Jours de Pénitence. Car si nous devons faire preuve d’union et de solidarité les uns envers les autres durant toute l’année, cette disposition doit s’intensifier pendant cette période. Le Zohar attribue aux jours de Roch Hachana le verset des Rois : « Je vis au sein de mon peuple » (II 4, 13), pour dire que l’espoir de l’homme en ces jours est de s’associer à sa communauté, pour jouir de son mérite.
C’est donc ainsi que le Maor Vachémech explique le premier verset de notre paracha : « “Vous vous tenez tous ici“ – autrement dit, vous avez tous droit à un maintien devant l’Eternel parce que vous vous présentez avec “vos chefs de tribus, vos anciens, tout membre du peuple juif“, c'est-à-dire que vous êtes unis comme un seul homme, avec un seul cœur, en vivant dans l’harmonie, l’amour de l’autre, l’amitié (…) et c’est ainsi que l’on suscitera sur nous la Miséricorde divine ».


Par Y. Bendennoune à partir d’un article du rav Moché Reiss

Source Chiourim