L'élection surprise à un poste de gouverneur régional en Slovaquie d'un néonazi connu pour son discours antirom, a suscité une vive émotion au sein des organisations humanitaires et de la communauté juive. La victoire dimanche de l'ultra-nationaliste Marian Kotleba, 36 ans, élu gouverneur de la région de Banska Bystrica, dans le centre de la Slovaquie, intervient alors que plusieurs partis d'extrême droite en Europe viennent de décider d'unir leurs forces en vue des élections européennes de mai 2014.
Le Congrès juif européen basé à Paris a appelé lundi les responsables de l'UE à créer un plan d'action contre les partis politiques néonazis «avant qu'il ne soit trop tard».
«Les néonazis remportent de nombreuses victoires politiques et utilisent le système démocratique contre les démocrates. La démocratie doit se défendre», a déclaré son président Moshe Kantor dans un communiqué.
M. Kotleba, qui parle de l'OTAN comme d'une organisation «terroriste» et veut réintroduire la devise slovaque à la place de l'euro, est un admirateur de l'ancien président slovaque Jozef Tiso qui avait accepté d'envoyer des dizaines de milliers de juifs dans les camps de la mort quand la Slovaquie fut un Etat fantoche sous la coupe de l'Allemagne nazie.
Cet ancien instituteur, ex-leader du groupe d'extrême droite «Communauté slovaque», dirige actuellement le petit parti nationaliste «Notre Slovaquie», dont les membres portent des uniformes inspirés des modèles des nazis de la Seconde guerre mondiale.
Il a été interpellé à plusieurs reprises et mis en examen pour ses propos extrémistes, principalement dirigés contre la minorité rom de Slovaquie, mais les poursuites ont été par la suite abandonnées.
Alors que le pays traverse une phase de ralentissement économique, Marian Kotleba qualifie les Roms de «parasites» et menace d'expulser ceux qui occupent un bidonville non autorisé sur un terrain qu'il a récemment acheté à Krasnohorske Podhradie (Est).
Il a battu au second tour des élections régionales ce week-end son rival du parti social-démocrate au pouvoir Smer-SD Vladimir Manka, par 55,5% des voix contre 44,5%.
Le Premier ministre Robert Fico, chef du parti Smer, qui s'était dit persuadé que M. Manka remporterait la victoire, a blâmé les médias et les partis de centre-droit pour ce résultat.
M. Kotleba pourrait utiliser le fauteuil du gouverneur comme un «point de départ pour construire un soutien au niveau national et se lancer dans les élections générales en 2016», a commenté pour l'AFP Marian Lesko, un analyste politique de l'hebdomadaire Tendance de l'entreprise.
Le président Ivan Gasparovic s'est déclaré «surpris du résultat», estimant qu'il s'agissait d'un «avertissement pour les hommes politiques qui ne doivent pas rester insensibles et indifférents aux problèmes auxquels les gens sont confrontés depuis longtemps».
«Je ne suis pas du tout surprise de la victoire de Kotleba», a déclaré à l'AFP Marina Galisova, une résidente de Banska Bystrica.
«Je connais des gens qui ont voté pour lui, ils ne sont pas vraiment racistes, ils sont juste frustrés par l'incapacité des politiciens à résoudre leurs problèmes», a-t-elle estimé, ajoutant qu'elle méprisait Kotleba pour ses opinions extrémistes.
M. Kotleba est apparu dans un seul débat pré-électoral télévisé, où il a exigé des coupes dans les prestations sociales pour la minorité rom.
Environ la moitié des 400.000 Roms de Slovaquie sont pleinement intégrés dans la société tandis que le reste vit dans quelque 650 bidonvilles sans eau ni électricité, situés pour la plupart dans l'est de la Slovaquie.
«Tout le monde est perdant dans ces élections. Le succès de Kotleba est le résultat de la haine, de l'impuissance et de la frustration à l'égard des politiciens», estimait lundi le grand quotidien slovaque SME.
La Slovaquie, 5,4 millions d'habitants, membre de l'Union Européenne depuis 2004 et de la zone euro depuis 2009, a enregistré une croissance de 2% l'an dernier et espère +0,8% cette année, alors que le taux de chômage y atteint 14%.
Source 20 Minutes