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mardi 2 avril 2013

Il y a 85 ans , la première tentative d'Etat juif au Birobidjan



Le 28 mars 1928, le présidium du Comité exécutif général de l'Union soviétique a approuvé la création d'un foyer national juif autonome à l'extrémité orientale du pays. Le nom donné à cette région, le Birobidjan, est tiré du nom de la capitale du district qui borde la Mandchourie.

À l'époque, le gouvernement de Joseph Staline encourageait encore le développement des identités nationales pour les différents groupes ethniques qui composent la population du vaste empire soviétique.
Bien que la pratique religieuse ait été prohibée par le régime communiste, les Juifs étaient perçus comme un groupe uni principalement par une langue et une culture communes. Le Birobidjan était ainsi conçu pour devenir la " patrie" des Juifs d'URSS, avec deux langues officielles, le russe et… le yiddish.
Cette terre qui leur était attribuée en propre devait aussi permettre aux Juifs de devenir "enfin productifs, compte tenu de leur tendance" estimait le pouvoir soviétique " à persister dans leurs métiers traditionnels leurs comme le commerce et l'artisanat" qui rendaient difficile leur intégration à l'économie communiste.
Dans la période qui a suivi la guerre civile russe, un mouvement agricole juif avait déjà conduit à la création de soixante-dix-neuf colonies agricoles juives dans le pays.
Le Birobidjan était destiné à devenir la plus grande de ces colonies.
Un autre avantage pour les dirigeants soviétiques : un foyer national juif dans l'Extrême-Orient russe pourrait également servir d'alternative au sionisme pour les plus de 2,5 millions de Juifs d'Union soviétique ; son emplacement stratégique devrait aussi contribuer à consolider la région frontalière avec la Chine contre l'expansionnisme de l'Empire japonais.

Un effort particulier a été fait pour obtenir le soutien moral et financier des milieux internationaux socialistes juifs et yiddishisants dans cette entreprise.
Et, en effet, alors que le nazisme amorçait sa montée en Allemagne, le projet national juif en Birobidjan a suscité un intérêt croissant et un soutien au niveau mondial bien, que les organisations sionistes n'y aient pas adhéré.

En 1934, le Birobidjan est élevé au rang de "région autonome juive", l' "Oblast autonome juif" ("oblast" étant une subdivision politique en russe), la culture juive y est florissante dans la capitale qui est située tout de même à environ 6.000 kilomètres de Moscou.
Un théâtre Sholom Aleichem, un journal yiddish et des écoles enseignant en yiddish y fonctionnent à plein régime.

Contre toute attente et bien que le Birobidjan, zone rurale aux confins de la frontière chinoise, n'ait jamais possédé l'attrait romantique et historique de la Palestine pour les Juifs soviétiques, des milliers de Juifs y ont émigré durant les années 1930 et dans la période qui a immédiatement suivi la Shoah. La migration, entamée dès avril 1928 et, dans la décennie qui a suivi, 43 000 juifs soviétiques s'y installaient.
Dix-neuf mille d'entre eux seulement y sont restés.
Ce que l'on sait moins et qui est plus étonnant, c'est que 1.200 Juifs y ont immigré venant de l'extérieur du pays, y compris des États-Unis, d'Amérique du Sud et même de Palestine !

Mais les vents changeants de la politique stalinienne auront raison du grand projet qu'était destiné à être le Birobidjan.
La politique des purges de 1936-39 s'est accompagnée d'une disparition officielle du soutien du pouvoir au projet ce qui a amené à la destruction de la direction politique de la région et de nombre de ses institutions culturelles.

Après la Seconde Guerre mondiale, et bien qu'une première vague d'immigration ait renouvelé la population de la région, les politiques de plus en plus ouvertement antisémites du régime de Staline ont fini de dévaster le projet national juif en Birobidjan déjà très affaibli.
L'État soviétique est désormais déterminé à réprimer activement les institutions culturelles juives qu'il avait, quinze ans plus tôt, contribué à édifier.
L'utilisation du yiddish était désormais interdite dans les institutions publiques, le théâtre juif est démantelé et de nombreux écrivains juifs emprisonnés.

Si la région est encore officiellement appelée l' "Oblast autonome juif", les Juifs n'y représentent plus qu'environ 1% de la population aujourd'hui et la plupart de ceux qui y sont restés ont fini par gagner Israël dans les années 1990.
Et pourtant, un regain d'intérêt pour la culture juive a émergé au cours de la dernière décennie.
L’université nationale du Birobidjan enseigne l'hébreu et d'autres sujets à thème juif, l'Université israélienne de Bar-Ilan y dispense même un programme d'été en yiddish depuis 2007 et certaines écoles y offrent un enseignement en yiddish de qualité.


Source Israel Infos