jeudi 15 novembre 2018

Guerre au Yémen : l'archéologie d'un drame


La guerre fait rage au Yémen, où les nombreux observateurs sur place décrivent une situation humaine catastrophique. Maya Khadra propose des clefs de lecture pour mieux comprendre les raisons d'un conflit par lequel l'Iran et l'Arabie saoudite s'affrontent indirectement.......Décryptage.......



Depuis le début du «Printemps arabe» en trompe-l'œil, beaucoup de pays musulmans se sont trouvés déstabilisés par ces révolutions accaparées par les mouvements islamistes, nourries aux idées meurtrières et revendiquant un retour à des ères moyenâgeuses que l'Humanité croyait avoir enterrées.
Sunnites et chiites s'affrontent en se livrant à des guerres sanguinaires en Syrie, en Irak, au Yémen. 
Des tensions politiques sans précédent opposent les pays du Golfe: Qatar et Arabie Saoudite, et menacent l'équilibre du Liban, un pays multiconfessionnel précairement basé sur le consensus intercommunautaire. Tout commence en 1979, date de la révolution islamique en Iran. 
Le rêve expansionniste du croissant fertile du chiisme se concrétise et ses tentacules arrivent jusqu'à la mer rouge, contrôlée par l'Arabie saoudite. Ils briguent la façade méditerranéenne au Liban. 
Les Houthis au Yémen et le Hezbollah au Liban en sont les agents.
L'Islam au Moyen-Orient a toujours tété aux mamelles du gauchisme panarabe ou baassiste.
Le Yémen, ce territoire tribal d'allégeance zaïdite, a toujours été un pays déflagré où différentes aspirations idéologiques croisent le fer. Même son système judiciaire est basé sur une cohabitation improbable du droit islamique avec le droit britannique et des coutumes locales. 
Au temps du mandat britannique à Aden, dans le sud du pays, des insurrections communistes ont eu lieu. 
Fortement soutenues par le chef du Panarabisme, Jamal Abdel Nasser, les révolutionnaires d'Aden s'entraînaient pour aller guerroyer au Liban contre les milices chrétiennes et dans toute zone de crise dans les années 60 et 70. La gauche à Aden était anti-impérialiste et a réussi à instiller cette tendance politique hostile vis-à-vis de de la culture occidentale, par extension, dans les mouvements islamistes les plus radicaux, les Houthis à l'heure actuelle. L'Islam au Moyen-Orient a toujours tété aux mamelles du gauchisme panarabe ou baassiste.
Mille fois sujet à des partitions, le Yémen est unifié en 1990 sous la coupole d'un régime républicain dirigé par Ali Abdallah Saleh. Mais les dégâts collatéraux de cette unification historique ont été la marginalisation ressentie dans la communauté des tribus Zaïdites au nord du Yémen. 
Les Zaïdites sont une branche du chiisme non duodécimaine (ils ne croient pas en l'existence des douze imams successeurs de Mahomet). Ils sont donc les plus proches des sunnites. 
Cependant, pour mettre du feu aux poudres d'un conflit au Moyen-Orient, la condition sine qua non est le recours quasi-incoercible aux extrémismes religieux. 
L'Iran, depuis la dynastie des Safavides duodécimains (1501), brigue l'expansionnisme au Moyen-Orient dans le but de contrôler des points géostratégiques vitaux: le port d'Al-Hudaida, Aden, Damas, Bagdad, voire Beyrouth. 
C'est un ancien réflexe guerrier perse qui s'est perpétué après la chiisation de l'Iran. Ayant déjà implanté le Hezbollah au sein de la communauté chiite au Liban dans les années 80, l'Iran alimente depuis des années les Houthis (du nom de leur dirigeant Hussein Badreddine El-Houthi) en armes et œuvre à leur endoctrinement. 
Les Houthis ont un drapeau similaire à celui du Hezbollah et brandissent le même slogan: «Dieu est le plus grand, Mort à l'Amérique, Mort à Israël, Maudits soient les juifs, Victoire à l'Islam». 
Ils deviennent duodécimains et idéologiquement, ils se battent pour la Velayet-el Faqih (le gouvernement du docte) ; doctrine chiite instaurée après la révolution islamique iranienne. 
Ils rentrent sous l'obédience de l'ayatollah Khomeini et exécutent le projet chiite déstabilisant la région. 
Le Secrétaire général du Hezbollah libanais, Sayyed Hassan Nasrallah, commande des troupes militaires au Yémen et l'entrelac des milices chiites est presque inextricable. Le Hezbollah et les Houthis se battent en Syrie, au Yémen, en Irak, au Bahrein et possèdent des cellules mafieuses en Afrique, en Europe et en Amérique du sud.
Après Sanaa, les gouvernorats de Saada, Al Jawf, Amran et Hajjah, le village de Jabira en Arabie Saoudite, les Houthis contrôlent Al Hodeida ; ville portuaire stratégique donnant sur la Mer rouge. La coalition des pays sunnites présidée par l'Arabie saoudite et soutenue par l'ONU s'évertue d'asseoir son autorité dans cette ville. 
Les bombardements sont atroces. 110 morts ont succombé aux bombardements lors de la dernière bataille, la famine bat son plein et la facture humaine s'alourdit… L'Arabie saoudite investit tout son arsenal militaire dans cette guerre. Son influence est en danger. 
Ses canaux d'exportation de pétrole le sont aussi. Et elle est prête à tout faire. Irrépressiblement. Sans ambages. Comment interpréter alors la détention du Premier ministre libanais Saad Hariri en 2017, qui a accepté de former un gouvernement d'union nationale avec le Hezbollah, acteur majeur dans le conflit yéménite? 
Les médias des Houthis diffusent à partir de la banlieue sud de Beyrouth, fief lugubre du Hezbollah et le Liban est accusé de complaisance à l'égard de la milice chiite.
L'Arabie saoudite, qui a reconstruit le Liban après la petite guerre de juin 2006 entre le Hezbollah et Israël, ne s'est pas tue. La guerre entre chiites et sunnites qui date depuis la mort du Prophète est à son acmé. 
Et les chiites, longtemps marginalisés sous les différents califats, prennent leur revanche en s'appuyant sur une nation possédant des centrales nucléaires et qui sait, peut-être demain, la bombe atomique. L'Iran.

Source Le Figaro
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