lundi 20 novembre 2017

A la rencontre du docteur Eleanor Nche, médecin camerounais en spécialisation en Israël


Alors que de nombreux professionnels de santé camerounais se rendent généralement en Europe ou aux Etats-Unis, Eleanor Nche a choisi, depuis 2014, de suivre une spécialisation en ophtalmologie au Proche-Orient. Formation qui s’achève en 2018. Elle nous parle des conditions de sa formation en Israël et de ses perspectives professionnelles.......Détails........



La reconnaissance du travail bien fait est une récompense, des fois, bien plus appréciée qu’un salaire.
Nous sommes en 2012. Eleanor Nche, fraîchement diplômée de la Faculté de médecine et des sciences biomédicales (FMSB) de l’université de Yaoundé I, exerce comme médecin généraliste à l’hôpital régional de Bamenda (Nord-Ouest Cameroun).
Au mois de juillet de cette année, l’Agence israélienne pour la coopération internationale au développement (Mashav) organise une campagne de soins de la vue dans le Nord-Ouest et c’est l’hôpital où exerce le Dr. Nche qui est retenu pour accueillir les médecins israéliens durant leur séjour, pour des formations, dépistages et opérations.
Ladite campagne est organisée en collaboration avec l’ambassade d’Israël au Cameroun – dirigée à cette époque par S.E. Miki Arbel – ; le ministère de la Santé publique, « Eye from Zion » – une organisation israélienne qui mène des missions médicales humanitaires – et le Shalom Club (association regroupant des bénéficiaires de formations en Israël via Mashav) de Bamenda.
A l’issue de la campagne, le Dr. Michael Halpert, à la tête de l’équipe de médecins israéliens, suggère à Eleanor Nche – qui a été associée à la campagne – de suivre une spécialisation en ophtalmologie en Israël.
Marqué par sa contribution, il lui propose même d’examiner la possibilité d’une formation au Centre médical Hadassah (Hadassah Medical Center), l’un des principaux centres hospitaliers israéliens.
La suggestion, bien accueillie par l’intéressée, lui permettait du coup d’affiner son projet professionnel.
Encore étudiante en Faculté de médecine, Eleanor Nche confie qu’elle voulait se spécialiser en chirurgie générale après sa formation. Son expérience dans le cadre de la campagne menée en 2012 à l’hôpital régional de Bamenda et son contact avec les médecins israéliens l’ont déterminée à s’intéresser à une partie du corps humain en particulier : l’œil.
En 2014, après deux ans de démarches pour satisfaire les conditions exigibles – dont celles ayant surtout trait aux finances – Eleanor Nche arrive à Jérusalem, pour commencer sa spécialisation en ophtalmologie dans les deux hôpitaux du Centre médical Haddasah ; qui se trouvent sur le mont Scopus et à l’ouest de la ville, à Ein Kerem.

Une vue des bâtiments abritant l’hôpital Hadassah à Ein Kerem, Jerusalem


A Hadassah, Eleanor Nche retrouve le Dr. Michael Halpert, chef de la clinique d’ophtalmologie complète dans le Centre ; et le Pr. Pe’er Jacob: chef de département d’ophtalmologie à Hadassah Medical Center, qu’elle qualifie de personnalité dont l’apport a été « déterminant » pour permettre sa formation en Israël. 

Le Pr. Pe’er Jacob est aussi une sommité dans les sociétés savantes d’ophtalmologie.
Il a notamment présidé la Société internationale de pathologie ophtalmique (International society of ophtalmic pathology) de 2000 à 2004 ; et la Société internationale d’oncologie oculaire (International society of ocular oncology) de 2007 à  2011.

Perception d’Israël
 
Journalducameroun.com a rencontré le Dr Nche fin octobre 2017 à Yaoundé. Elle revenait de Bamenda, sa région natale, où elle était allée rendre visite à sa famille dans le cadre de ses congés.
Lorsqu’elle est interrogée sur son impression concernant la vie en Israël – qui fait régulièrement l’actualité sur des plans sécuritaire, militaire et diplomatique dans les relations avec les Etats voisins – Eleanor répond sans préambule : « C’est un pays avec un standard élevé de niveau de vie ».
A l’Indice de développement humain 2016 du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), cet Etat du Proche Orient est en effet classé 19e (sur 188 pays).
D’après des données de la Banque mondiale, le PIB par habitant dans ce pays était de 37 292 dollars en 2016, légèrement devant celui de la France (36 854 dollars) mais au moins 30 fois plus élevé que celui du Cameroun (1032 dollars). Autre indicateur important et non le moindre, Israël fait partie, avec la Corée du Sud, des deux principaux pays au monde qui financent le plus la recherche et développement d’après des enquêtes régulièrement menées par l’Organisation pour la coopération et le développement économiques (OCDE).
Pour sa spécialisation, Eleanor Nche a dû se mettre à la langue hébreu pendant un semestre, à son arrivée.
« Je me suis adaptée », affirme-t-elle fièrement. La formation à Hadassah est faite de pratique et de cours, entre 07h30 et 20h00, chaque jour.


Le Dr Eleanor Nche dans une opération à Hadassah
 
Dans le cadre ses rapports avec les Israéliens, Eleanor affirme que ce sont des personnes « travailleuses », « franches, et directes ». 
« J’aime ça ! », assure-t-elle. Le médecin déclare que s’il fallait choisir une seconde patrie, après le Cameroun, « ce serait Israël ».

Amour pour le Cameroun
 
Après sa spécialisation, qui s’achève en juin 2018, et peut-être une sous-spécialisation qui pourrait prendre une à deux années supplémentaires, Eleanor Nche envisage de rentrer au Cameroun, pour exercer à Bamenda, question de mettre son expertise au service de la ville qui l’a vue naitre et où résident ses parents ainsi que sa fille.
Elle raconte, avec regret, qu’une équipe de médecins israéliens dans laquelle elle devait aussi faire partie, n’a pas pu conduire une campagne gratuite de soins de la vue dans la région anglophone du Nord-Ouest en janvier 2017, à cause de la crise qui s’y est installée depuis la fin d’année 2016.
Mais ce n’est pas assez pour la dissuader d’y rentrer travailler.
D’après elle, si des Camerounais bien formés n’apportent pas leur potentiel au Cameroun, il ne faut pas s’attendre à ce que quelqu’un d’autre vienne le faire.
D’après un profil national réalisé pour le compte du Cameroun en 2009 par l’Organisation internationale des migrations (OIM), l’émigration de travailleurs camerounais qualifiés sur la période étudiée (1995-2005) touchait particulièrement les médecins et les universitaires.
A cette période, 46% des médecins camerounais avaient émigré dans neuf pays développés : France, Etats-Unis, Australie, Belgique, Canada, Portugal, Afrique du Sud, Espagne, Royaume Uni. D’après l’Ordre des médecins, cité dans cette étude : « 4200 médecins camerounais, en majorité des spécialistes, exercent à l’étranger. Sur place, il en reste seulement 800 ».
Ces données ont cependant évolué entre 2009 et 2017.

Le Dr Eleanor Nche dans son bureau à Hadassah Medical Center (Israël). Sa spécialisation en ophtalmologie s’achève en juin 2018
 
En revenant exercer au Cameroun, le Dr Eleanor Nche ne va pas être ajoutée à cette saignée des professionnels de santé du pays.
Dans sa spécialité, le Cameroun dispose d’une centaine d’ophtalmologistes ; « 105 plus précisément, parmi lesquels 11 sous-spécialistes », d’après des données recueillies par Journalducameroun.com auprès de la secrétaire générale de la Société camerounaise d’ophtalmologie (SCO), Dr Danielle Beleho.
Ce sont données à jour, au mois de novembre 2017, mais elles pourraient être plus importantes car il y a des ophtalmologues qui « ne se sont pas encore déclarés à la SCO », précise le Dr Beleho. On apprend par ailleurs à la SCO, selon les estimations, que « 80% environ de la population [camerounaise] souffre des problèmes de vue ».
Source Journal du Cameroun
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