jeudi 12 janvier 2017

Quand les Mata Hari sortent de l'ombre....


 
À travers une série de portraits, la journaliste Chloé Aeberhardt plonge dans le passé d'une quinzaine d'agents de renseignements. Retraitées du Mi5, de la CIA du KGB ou du Mossad, ces femmes d'influence brisent les clichés de ce métier trop souvent associé à une mythologie masculine......
 

C’est peut-être stupide, sans doute un reflet des rapports hommes-femmes, assurément injuste, mais on parle plus souvent d’espions que d’espionnes. Rendre compte de ces "Femmes qui en savaient trop", l’enquête de Chloé Aeberhardt en librairie demain (Robert Laffont, 289 pages, 20 euros), s’apparente donc à rendre justice à un travail qui, lui-même, rend hommage à ces "Mata Hari" de l’ombre.
En se plongeant dans cette quinzaine de portraits, on mesure malgré tout que les a priori de départ ont la peau dure ; si le plus célèbre des espions au monde, James Bond, est un homme - cependant bien épaulé par sa directrice M, en tout cas à partir de "Casino Royal" - ce n’est pas totalement un hasard. Chloé Aeberhardt, aujourd’hui journaliste à …M, a ainsi retrouvé Stella Rimington, première femme à avoir dirigé le Mi5 - les services secrets anglais - en…1992 (jusqu’en 1996).
Il a donc fallu attendre quatre-vingt-trois ans (les services secrets anglais ont vu le jour en 1909) avant qu'une femme se hisse à leur tête.
"Dès l’annonce de sa nomination, les médias sont devenus fous", relèvent l’auteure.
"Ils voulaient tous savoir qui était cette femme qui occupait un poste d’homme, se rappelle Stella, quatre-vingt ans désormais. Comme ils n’avaient pas d’éléments, ils ont fait de moi une Mata Hari, une James Bond girl, un monstre féroce de Whitehall, alors que je n’étais rien de tout cela." So British, elle se dépeint comme une personne "pragmatique", qui "aime résoudre les problèmes".
"Ce dont les services secrets ont besoin, c’est de diversité. Les deux sexes sont nécessaires pour apporter cet élément de surprise dans les méthodes d’approche", précise encore Stella Rimington, dont on pourrait presque croire, à l’humilité (et à un goût toujours intacte pour le secret) qu’elle affiche, qu’elle a mené une honnête carrière de fonctionnaire.
Il en est de même avec "Yola", une espionne israélienne qui, au début des années 1980, a supervisé l’exfiltration vers Israël de centaines de Juifs éthiopiens ayant trouvé refuge au Soudan. À l’image de sa consœur anglaise, "Yola" "déteste" parler d’elle-même.
Mais "il faut réécrire l’Histoire en rendant aux femmes la place qui leur est due, a-t-elle expliqué à la journaliste.
Trop d’adolescentes ne s’intéressent qu’à la mode, à la musique et aux célébrités. Nous devons leur montrer qu’elles aussi peuvent accomplir quelque chose."
Comme de sauver des centaines de vies, face discrète et obscure du métier d’espion, loin des opérations spectaculaires comme les prises ou échanges d’otages, les exécutions, les interrogatoires "sophistiqués."
L’objectif affiché en début d’ouvrage par Chloé Aeberhardt est donc largement atteint : casser les clichés d’un univers soi-disant unilatéralement masculin. "Les espionnes font rêver beaucoup de monde, les petites filles, les fans d’Ian Fleming, les lecteurs des S.A.S, les romanciers, les scénaristes, les hommes en général.
Pourtant, personne ne sait exactement qui elles sont, quelles ambitions les ont portées, quelle a été leur vie", explique la journaliste.

Source GQ Magazine
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