lundi 28 mars 2016

Kamp ! Songs and Satire from Theresienstadt...




Le 15 avril prochain va sortir le disque réalisé à partir d’un enregistrement, à la fois dramatique et ironique, mettant en scène une histoire de l’épisode de Theresienstadt lors de sa transformation en un camp de transit pour les Juifs: « Kamp ! Songs and Satire from Theresienstadt » – Amelia DeMayo, Curt Buckler, Sergei Dreznin.





Toutes les paroles, poèmes et la plupart des compositions musicales de cette production et de cet enregistrement ont été écrits, adaptés et joués par les détenus de Theresienstadt entre 1942 et 1944.
Theresienstadt (ou Terezin) est d’abord une forteresse construite par l’impératrice autrichienne Marie-Thérèse pour consolider l’emprise des Habsbourg sur la Bohême.
En juin 1940, la Gestapo prend le contrôle de Terezin et installe une prison dans la KleineFestung (petite forteresse). En novembre 1941, le site est transformé en ghetto muré servant de façade à l’opération d’extermination des juifs sous l’impulsion du chef des SS Reinhard Heydrich.
Pour le monde extérieur, Terezin est présenté par les Nazis comme une colonie juive modèle; alors qu’il s’agit véritablement d’un ghetto qui sert également de camp de transit pour les juifs acheminés vers Auschwitz et les autres camps d’extermination.
Au total, 140 000 juifs sont déportés à Theresienstadt. Un quart d’entre eux, soit environ 33 000, meurent sur place principalement à cause des conditions de vie atroces (famine, stress excessif, maladie, épidémie de typhus à la fin de la guerre, etc.).
87 000 autres sont transportés dans les camps d’extermination. Le dernier transport pour Auschwitz Birkenau a lieu le 28 octobre 1944; à peine 5 mois après le débarquement. 18 000 prisonniers sont déportés vers l’Est et il ne restera que 1574 survivants des chambres à gaz. Le 4 mai 1945, la Croix-Rouge internationale s’empare de Terezin et 5 jours plus tard, l’Armée rouge libère les 19 000 survivants.
Dans cette ville prison, la seule liberté est de créer. Les artistes continuent d’exercer leur art, surtout la musique, seule forme de résistance possible avec l’arme ultime – le rire.
Une centaine d’œuvres musicales sont composées, des milliers de dessins et de peintures sont créés, en plus des milliers de pages de journaux intimes remplies et de poèmes écrits, plus de 2000 conférences sont données sur les sujets les plus variés – et on publie même des critiques de spectacles !
Les Nazis utilisent cet engouement artistique pour alimenter leur machine de propagande; ils redistribuent même les instruments de musique confisqués peu de temps avant.
Parmi leurs actes les plus cyniques, en juin 1944 les Nazis donnent à Terezin, en quelques coups de pinceau, l’apparence d’une pimpante station balnéaire à la manière de Marienbad (station thermale en République tchèque). Ils paradent une délégation de la Croix-Rouge à l’intérieur des prétendues installations, d’où la musique fuse à chaque coin de rue, pour entretenir l’illusion de juifs insouciants vivant dans un prétendu centre de villégiature.
Cette gigantesque imposture se poursuivra, allant jusqu’à forcer un tournage de film destiné à tromper le monde entier : Le Führer donne un village aux juifs. Sous ce titre, le casting le plus cruel de toute l’histoire du cinéma. Engagé de force dans le rôle du metteur en scène, Kurt Gerron, acteur et réalisateur, sera expédié à Auschwitz aussitôt le tournage terminé, avec sa femme et la quasi totalité de la distribution.
C’est en octobre 1992 qu’Alexander Waechter, acteur et metteur en scène autrichien bien connu, décide de raconter l’histoire de son grand oncle Raimund (Remy) dans Chansons et Satires de Theresienstadt ; un spectacle de cabaret comprenant poèmes et chansons.
Un hommage à tous les artistes de Terezin. L’idée lui est venue pendant son voyage entre Vienne et Berlin, l’amenant à visiter Terezin et réalisant peu à peu toute l’histoire derrière ces murs. Une production tragique, mordante et ironique pour trois interprètes; un homme, une femme et un pianiste. Waechter écrit, dirige, raconte et chante.
Face à lui, Tania Golden, une jeune actrice et chanteuse viennoise reconnue, dont les parents ont fui les pogroms de la Deuxième Guerre mondiale. Sergei Dreznin, pianiste et compositeur juif russe, vivant à l’époque à Vienne, en est le directeur musical. Il compose avec Gerhard Bronner, légendaire compositeur et interprète, patriarche du cabaret viennois, plusieurs chansons inspirées du style de chacun des artistes originaux – complétant ainsi chansons et poèmes écrits à l’intérieur des murs de Terezin.
Un soir de 1993, Bronner, de retour de Vienne, se rend à la résidence de son ami Tom Neile, parolier à ses heures, avec un épais paquet de feuilles et lui demande d’adapter les textes en anglais : « C’est un spectacle qui se joue en ce moment en Autriche, dans des salles où les spectateurs s’entassent même debout.
Je veux le faire adapter pour le public américain! ». KAMP! a été présenté pour la première fois en décembre 1994 par  Michael Maurer en Floride, dans le public on retrouvait des survivants de l’Holocauste. S’en est suivi une série de représentations à travers les États-Unis.
Puis, en 2008 une version nommée « Cabaret Terezin » est produite par Josette Milgram et présentée en France dans plusieurs théâtres, en collaboration avec le ministère de la Culture et des Communications et le ministère de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche.


Source Tribune Juive