mardi 30 décembre 2014

ARTE diffuse une série anti-israélienne et anti-juive !


La chaine de télévision franco-allemande ARTE a programmé la rediffusion du téléfilm de Peter Kosminsky " Le serment " (The Promise) mercredi 31 décembre 2014 à 20h50. Lors de sa première diffusion sur Canal Plus, en mars 2011, le CRIF avait dénoncé la programmation de cette mini-série « orientée et remplie de stéréotypes anti israéliens et antiJuifs ». Nous republions ci-dessous de larges extraits d’un article de Laurent Larcher publié dans la Croix le 18 mars 2011, qui explique le caractère dangereusement biaisé de cette fiction...


Ambiguïté, parti pris

Peter Kosminsky met en scène une multiplicité de personnages censés évoquer tous les points de vue. Il tisse son propos autour d'événements dramatiques : la libération d'un camp en Allemagne, l'arrivée des déportés en Palestine, la lutte à mort opposant l'Irgoun aux Britanniques, l'attentat de l'hôtel King David, le carnage de Deir Yassin (massacre d'un village palestinien perpétré par l'Irgoun), l'exode des Arabes et la conquête de leurs maisons par des Juifs.
Ce premier tableau sert de toile de fond à l'époque contemporaine. À travers le regard innocent de son héroïne, accueillie dans une famille de la gauche israélienne pacifiste, il nous fait découvrir les terribles conditions de vie des Palestiniens en 2005.
Double positif des Juifs israéliens, les Palestiniens sont les victimes innocentes de cette histoire. De sorte que si Le Serment présente une vraie qualité narrative, il n'est pas sans ambiguïté, voire sans parti pris. À la fin de la projection presse organisée par Canal +, une salariée de la chaîne a eu spontanément cette réflexion : « Comment un peuple qui a été aussi persécuté peut-il être autant persécuteur ? »
« J'ai recueilli le témoignage de près de 80 anciens soldats britanniques, j'ai enquêté pendant huit ans », se défend Peter Kosminsky. On le croit volontiers. Mais reste que, si son travail nous plonge dans un pan peu connu de l'histoire - celui de la fin du mandat britannique -, il ne peut être pris pour une leçon d'histoire, mais pour une belle fiction de partisane.

Le film débute par une confusion embarrassante

Le Serment débute par une confusion embarrassante, comme le note l'historienne Annette Wieviorka (1) : « Les téléspectateurs vont croire que les Britanniques, en libérant le camp de Bergen-Belsen, ont libéré les Juifs d'un camp d'extermination. Or, Bergen-Belsen est un camp de concentration. Pour appuyer son propos, Kosminsky mêle des archives tournées à Bergen-Belsen et à Auschwitz. Ainsi, le film est construit, dès les premières minutes, sur un montage qui se donne pour vrai, mais qui est déjà faux. Ce qui, dans la suite du film, lui permet de suggérer combien les rescapés sont des ingrats», explique-t-elle.
Avant d'ajouter : « Doit-on rappeler que ces libérateurs ont confiné à Bergen-Belsen les rescapés des camps de la mort dans des baraquements, avant de les laisser mourir en masse du typhus ? » « Nous avons eu le sentiment que nos vies ne comptaient pas », jugeait Simone Veil en évoquant cet épisode.
Peter Kosminsky convoque la mémoire des vétérans pour justifier son propos. Or, ici comme ailleurs, mémoire n'est pas histoire. Toujours à propos des camps, le réalisateur, dans le souci de montrer que l'histoire est complexe, fait dire à l'une des rescapées que sa mère n'est pas venue avec elle en Palestine parce que, dans le camp, elle est tombée amoureuse d'un Italien avec lequel elle vit en Italie... autrement dit, il y a eu aussi de belles histoires d'amour « au camp ».

Embarrassante aussi la représentation des Juifs

On peut aussi s'interroger sur le procédé qui consiste à mettre sur un pied d'égalité l'attentat de l'hôtel King David en 1946 et celui d'un attentat-suicide en 2005 : « Le premier, quartier général britannique en Palestine, est une cible militaire, même si des civils - Arabes et Juifs - y sont employés. L'autre vise uniquement des civils, c'est un acte de terrorisme caractérisé », souligne Samy Cohen, directeur de recherche au Ceri (2).
Plus embarrassante, la représentation des Juifs dans le film : ils sont nécessairement riches, très riches. Quid de la classe moyenne et des Juifs israéliens pauvres ? Aux yeux de Samy Cohen, les trois premiers volets de cette saga ne sont pas trop manichéens, bien qu' « on y trouve des erreurs factuelles : "L'armée contrôle tout", fait dire Kosminsky au jeune Israélien de gauche qui en veut pour preuve le fait que les anciens Premiers ministres Rabin, Sharon, Barak et Shamir étaient d'anciens généraux. Or, Shamir n'a jamais été général. Et pour les autres, on est dans le cliché. Aucun d'eux n'a caressé l'armée dans le sens du poil. »
Mais dans le quatrième volet, le propos du réalisateur dérape : « Du côté juif, on ne voit que des activistes d'extrême droite comme s'ils constituaient à eux seuls toute la communauté juive de Palestine. Le téléspectateur n'entendra jamais parler de Ben Gourion ni du bras de fer entre la Hagana (future armée israélienne) et l'Irgoun…
Et puis, lorsque le réalisateur filme une unité de Tsahal venue détruire la maison d'un kamikaze dans Gaza, il construit sa séquence en s'inspirant de cas réels - les "boucliers humains" -, et les présente à tort comme de la routine. Cette pratique a été exceptionnelle et condamnée par la justice israélienne. » On peut s'attendre donc à une vive polémique à la suite de sa diffusion. C'est d'ailleurs, confie Manuel Alduy, le directeur du pôle fiction de Canal +, l'effet espéré.

Notes :
(1) Anette Wieviorka,  Auteur de Déportation et génocide. Entre la mémoire et l'oubli, Hachette, « Pluriel », Paris, 2003. Auschwitz, 60 ans après, Robert Laffont, 2005.
(2) Centre d'études et de recherches internationales, Sciences-Po, auteur de Tsahal à l'épreuve du terrorisme, Le Seuil, 2009 

Source Crif