jeudi 22 mai 2014

Le pape en Israël : assignation à résidence pour trois extrémistes juifs


La police israélienne a décidé de prendre des mesures d'éloignement, dont l'assignation à résidence, à l'encontre de trois juifs extrémistes de droite soupçonnés de vouloir perturber le prochain voyage du pape en Israël, a-t-on appris mercredi de source policière. La police et le Shin Beth (le service de sécurité intérieure) ont pris des mesures d'éloignement à l'encontre de plusieurs militants d'extrême droite, qui selon les informations du Shin Beth, projetaient de commettre des actes de provocation visant à aviver les tensions interreligieuses pendant la visite du pape les 25 et 26 mai, a déclaré à l'AFP une porte-parole de la police...



Ces mesures ont été prononcées pour une période de quatre jours, a précisé Louba Samri.
Selon les médias, les trois jeunes activistes seront assignés à domicile ou auront interdiction de quitter leur ville de résidence à compter de jeudi. L'armée israélienne sera chargée de l'application de ces mesures.
Ces ordres de restriction concernent notamment deux étudiants d'une yéshiva (école talmudique) située sur le Mont Sion, où le pape doit prononcer lundi prochain une messe au Cénacle, lieu du dernier repas du Christ pour les chrétiens et tombeau du roi David pour les juifs, a précisé le quotidien Haaretz.
Deux rassemblements de juifs ultra-orthodoxes et nationalistes religieux considérant comme impie la célébration d'une messe au Cénacle par le chef de l'Eglise catholique ont déjà eu lieu sur ce lieu saint, qui cristallise les tensions depuis plusieurs semaines. Un autre rassemblement, au même endroit, est prévu jeudi.


Climat de tension

L'avocat d'un des militants visés a estimé que la décision de la police portait atteinte au droit d'expression.
Israël devient un pays non démocratique qui met au silence les protestataires, a expliqué à l'AFP Me Itamar Ben-Gvir, qui assure régulièrement la défense de colons d'extrême droite.
Après une étape samedi en Jordanie, le pape François doit arriver dimanche à Bethléem pour un pèlerinage de deux jours dans les Territoires palestiniens et en Israël.
A Jérusalem, ville sous tension, sa visite fera l'objet d'un énorme dispositif policier, similaire à celui déployé lors de la visite du président américain Barack Obama en 2013. Au total, 8.000 policiers seront mobilisés dans la Ville sainte.
Israël a déjà renforcé la protection de certains lieux saints chrétiens, cibles d'une vague de vandalisme imputée à des juifs extrémistes, mais n'avait pris aucune mesure préventive contre de potentiels fauteurs de trouble jusqu'à présent.
Les agences de sécurité israéliennes craignent, selon les médias, que des activistes juifs radicaux n'exploitent le pèlerinage du pape en Terre sainte pour donner de la résonance à leur mouvance semi-clandestine.
Toutes sortes d'individus extrémistes distillent un climat de tension autour de cette visite. Nous ne succomberons pas à ces pressions et nous ne les laisserons pas faire, a assuré dimanche aux journalistes le chef de la police israélienne, Yohanan Danino.


"Strictement religieux"

Le voyage en Terre Sainte sera un voyage strictement religieux, a insisté mercredi le pape François, qui a dit vouloir y prier pour la paix, à trois jours de son départ pour cette courte visite en trois étapes, Amman, Bethléem, Jérusalem.
"Ce sera un voyage strictement religieux, d'abord pour une rencontre avec (le patriarche oecuménique de Constantinople) Bartholomée: Pierre et André se rencontreront une nouvelle fois, et cela, c'est très beau!", s'est-il exclamé à la fin de l'audience générale sur le place Saint-Pierre, en référence aux deux apôtres de Jésus, représentant l'Eglise d'Occident et l'Eglise d'Orient.
François a choisi le cinquantième anniversaire de la rencontre historique du pape Paul VI et du patriarche oecuménique de Constantinople Athénagoras, à Jérusalem, pour relancer l'élan oecuménique, alors que les Eglises orthodoxes et catholiques d'Orient sont très divisées entre elles.
Sous la devise qu'ils soient un, le logo du voyage représente Saint Pierre, chef de l'Église de Rome, et Saint André, chef de l'Église de Constantinople, sur une barque, à la voile tenue par une seule croix.
"Le deuxième motif du voyage est de prier pour la paix dans cette terre qui souffre tant", a-t-il ajouté, demandant aux fidèles rassemblés sur la place Saint-Pierre de prier pour ce voyage.


Éviter les pièges politiques

Le rabbin argentin Abraham Skorka, un ami proche de Jorge Bergoglio et qui l'accompagnera durant toute la durée de son voyage en Terre sainte, a affirmé que le pape essayera d'éviter les pièges politiques dont la région est pourtant truffée, en maintenant une ligne équilibrée avec les trois communautés, chrétienne, juive et musulmane.
Interrogé sur la répartition des visites entre les deux côtés, israélien et palestinien, lors d'une conférence de presse à Jérusalem, le rabbin a affirmé qu'il y aura des rencontres significatives avec le peuple palestinien.

Mardi, dans une lettre envoyée au Saint-Père, les habitants des villages arabes chrétiens d'Iqrit, et ceux du village catholique voisin de Kafr Biram, l'imploraient "d'intensifier (ses) efforts sacrés pour faire pression sur le gouvernement d'Israël afin de mettre fin aux injustices qu'il a infligées à notre communauté".
"Nous espérons que votre prochaine visite en Palestine et en Israël tendra à servir ce dessein", plaident ces "Palestiniens de l'intérieur", descendants de la minorité de leur peuple restée sur place après la création d'Israël en 1948.
Les Arabes chrétiens de Galilée, détenteurs de la nationalité israélienne, confessent une certaine déconvenue, car, contrairement à ses prédécesseurs, le pape François ne viendra pas à leur rencontre pendant son pèlerinage éclair.
Autre différence, quand il sera en Israël, il se rendra au Mont Herzl pour y déposer une gerbe, "ce que ses prédécesseurs n'ont pas fait il me semble", a souligné le rabbin Skorka au sujet du volet israélien de la visite du pontife.
Cette visite prévue lundi au plus grand cimetière militaire d'Israël et lieu où est enterré le fondateur du sionisme Theodor Herzl a été fortement critiquée par Omar Barghouti, membre fondateur du mouvement BDS (Boycott, désinvestissement, sanctions) dans les Territoires palestiniens qui a appelé le pape à ne pas ternir sa visite par de tels gestes.
Ce dépôt de gerbe a une très grande signification, a pour sa part souligné Oded Ben Hur, ancien ambassadeur d'Israël au Vatican, rappelant qu'en 1904 Herzl avait sollicité en vain le soutien du pape Pie X au retour des Juifs à Sion.

Source I24News